Une technologie de tumeur sur puce améliore la recherche sur le cancer
Le cancer du sein représente toujours l’un des cancers les plus fréquemment diagnostiqués chez les femmes dans le monde. Bien qu’une meilleure sensibilisation et des traitements améliorés aient permis de réduire le taux de mortalité chez les femmes plus âgées, celui-ci demeure inchangé chez les femmes de moins de 50 ans. «La principale cause de décès est la métastase», explique Christa Ivanova, partenaire de l’équipe du projet MTOAC et responsable de l’innovation et de la recherche chez ELVESYS, en France. «Cela désigne la séparation de cellules de la masse tumorale principale, pour envahir des tissus et des organes via la circulation sanguine. Une fois que le cancer forme des métastases, les chances de survie diminuent drastiquement.» Le projet MTOAC, qui a été entrepris avec le soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie, a été lancé dans le but de mieux comprendre le processus de la métastase. Pour y parvenir, l’équipe du projet s’est attelée à la construction d’un dispositif microfluidique capable de recréer l’environnement physiologique d’une tumeur. L’idée consiste à fournir aux scientifiques un moyen simple et abordable de cultiver et d’analyser des cellules tumorales. Parmi les principaux avantages de la technique, il sera possible de formuler des résultats comparables à ceux de modèles in vivo, tout en bénéficiant d’un outil plus abordable, plus éthique et plus simple d’utilisation.
Imiter l’environnement de la tumeur
Le dispositif microfluidique développé par l’équipe du projet comprend une petite puce microfluidique où il est possible de cultiver des cellules, ainsi que des pompes qui régulent le flux de nutriments vers les cellules (ce qui permet d’imiter le corps). La puce en elle-même contient trois chambres reliées par des petits canaux. «L’idée était de mettre en culture des cellules dans chaque compartiment pour nous permettre d’étudier la croissance et le comportement cellulaire», ajoute Christa Ivanova. Après avoir fabriqué la plateforme de culture cellulaire microfluidique, l’équipe du projet a mis en culture des cellules, notamment des cellules cancéreuses du sein disponibles sur le marché. Les cellules ont été incorporées à un hydrogel composé de collagène pour les aider à adhérer à la puce microfluidique. Elles ont ensuite pu proliférer pour former des structures en 3D. Après quelques jours, ces systèmes de «tumeur sur puce» ont été analysés pour évaluer l’absorption de glucose, l’hypoxie et les interactions entre les différents types de cellules. «Nous avons identifié que les cellules dérivées de tumeurs consomment davantage de glucose», explique Christa Ivanova. «Cela paraît logique, dans la mesure où elles affichent une croissance plus rapide. Nous avons également déterminé que le centre de la culture cellulaire en 3D se nécrose à cause de l’hypoxie. Cela est courant dans les tumeurs, dans la mesure où la croissance cellulaire rapide perturbe l’approvisionnement continu en sang ou en oxygène frais. C’est l’étape qui précède souvent la métastase.» L’équipe a également identifié qu’une coculture de cellules de cancer du sein et de cellules des vaisseaux sanguins provoquait une migration des cellules tumorales vers les cellules des vaisseaux sanguins. «Ces trois observations confirment les recherches précédemment publiées», note Christa Ivanova. «Cela semble suggérer que le système de culture cellulaire en 3D que nous avons mis au point est capable d’imiter le microenvironnement réel de la tumeur.»
Une solution normalisée
La réussite de ce projet souligne le potentiel de la technologie microfluidique pour aider les scientifiques à mieux comprendre les mécanismes biologiques qui sous-tendent le cancer. «La complexité de la microfluidique a été intimidante par le passé», indique-t-elle. «Nous espérons que ce système microfluidique simple d’utilisation permettra à plus de chercheurs de tirer parti de cette technologie.» En effet, le projet MTOAC représente un jalon important sur le chemin vers un système normalisé de tumeur sur puce, susceptible de remplacer un jour les modèles animaux lorsque cela sera possible. La normalisation est cruciale: bien qu’il existe déjà plusieurs systèmes de tumeur sur puce disponibles sur le marché, ils sont souvent limités à des lignées cellulaires spécifiques, et demeurent très onéreux. «Nous poursuivrons les travaux sur ce système afin de le rendre plus accessible et mieux connu de la communauté de la recherche», ajoute Christa Ivanova.
Mots‑clés
MTOAC, tumeurs cancéreuses, microfluidique, sein, cancer, cellule, hypoxie, circulation sanguine