De nouveaux modèles permettent de créer des alliages métalliques plus solides et plus ductiles
Les modèles informatiques sont de plus en plus utilisés dans un certain nombre de secteurs pour aider à évaluer les performances des produits, les processus de synthèse et de sélection des matériaux, ainsi que la fabrication matérielle des composants. Tester les propriétés des matériaux n’est pas simple, car les phénomènes sous-jacents s’étendent sur une vaste gamme d’échelles de longueur et de temps. Il est essentiel de combiner des informations aux niveaux quantique, atomistique, mésoscopique et macroscopique pour développer des modèles multi-échelles qui décrivent le comportement des matériaux, et même le prédisent. Les métallurgistes ont introduit une grande variété de nouveaux alliages au cours des 60 dernières années. «Le développement d’alliages métalliques nouveaux ou meilleurs repose essentiellement sur une compréhension approfondie des phénomènes physiques fondamentaux qui sont à la base de leurs propriétés impressionnantes, ou inversement, des facteurs ayant un impact négatif sur leurs propriétés. En raison de la complexité de ce projet, il n’y a eu que des améliorations graduelles des alliages existants ou des améliorations fortuites à partir de matériaux mis au point à titre expérimental», note le professeur Bill Curtin, coordinateur du projet PreCoMet financé par l’UE. Les recherches menées dans le cadre du projet ont permis de mettre au jour des phénomènes physiques importants qui affectent la résistance et la ductilité de certaines classes de métaux. Des alliages de magnésium plus ductiles en ligne de mire Sous sa forme pure, le magnésium est difficile à étirer et à façonner, il manque également de résistance pour de nombreuses applications structurelles. Les chercheurs de PreCoMet se sont concentrés sur l’identification des origines de ce comportement inhabituel, à l’échelle atomique. Des simulations d’interactions du magnésium à l’échelle atomique leur ont permis de dresser un tableau donnant une certaine cohésion à des décennies d’expérimentation sur les propriétés macroscopiques de ce matériau. «Les principaux défauts atomistiques, appelés dislocations, font office de “supports” de la déformation plastique; ils permettent aux plans cristallins voisins de glisser les uns sur les autres. Nous avons toutefois constaté un comportement inhabituel lors de l’étude de la structure d’une dislocation importante, qui a commencé à prendre la forme de plusieurs géométries possibles, la bloquant et l’empêchant de se propager. Ces nouvelles structures avaient déjà été observées expérimentalement, mais elles avaient été considérées comme des anomalies expérimentales», explique le professeur Curtin. Les chercheurs ont montré que cette structure immuable est propre au magnésium et explique sa faible ductilité. L’équipe a ensuite découvert que l’ajout de terres rares, tels que l’yttrium, le néodyme et le gadolinium, même à de faibles concentrations, augmentait considérablement le nombre de dislocations mobiles et améliorait donc la ductilité du magnésium. À l’aide de ses modèles, l’équipe a prédit de nouveaux alliages présentant de bonnes propriétés ductiles, évitant ainsi d’avoir recours aux terres rares, des éléments qu’il est moins souhaitable d’utiliser. Éliminer les incertitudes pour les nouveaux alliages à haute entropie Constituée de plusieurs éléments, la nouvelle classe d’alliages à haute entropie est très recherchée, entre autres pour sa forte solidité et sa résistance à la rupture élevée sur une grande plage de températures. Malgré 70 années d’expériences, aucun modèle n’a permis de prédire avec précision la résistance des alliages, même dans des structures simples où un seul élément domine. Les chercheurs ont étendu leurs travaux à la modélisation de classes d’alliages avec deux structures cristallines communes, indépendantes du nombre d’éléments et de leurs concentrations. À l’aide de leurs modèles, ils peuvent réussir à prédire la résistance de nombreux alliages à partir de certaines propriétés atomiques fondamentales. «Nous pouvons maintenant concevoir de nouveaux alliages à haute résistance qui n’avaient jamais été fabriqués auparavant. Compte tenu du grand nombre de combinaisons possibles en termes de composition, il s’agit d’un exploit majeur, car il est difficile pour les scientifiques spécialistes des matériaux de savoir où chercher de nouveaux alliages à haute entropie», conclut le professeur Curtin. Les travaux du projet pourraient aider les ingénieurs à développer des alliages spéciaux pour un large éventail d’applications allant de l’aérospatiale à l’automobile, en passant par l’industrie biomédicale.
Mots‑clés
PreCoMet, modèle, magnésium, alliage à haute entropie, alliage métallique, ductilité, dislocation, terres rares