À la recherche d'un verre de vin sans histamine
Les bactéries lactiques (BL) produisent de l'énergie à partir de la voie métabolique de décarboxylation. Les bactéries lactiques utilisent également la décarboxylation pour réduire le niveau d'acidité en transformant les acides aminés en amines. Malheureusement, les amines biogènes produites par ces voies biochimiques qui sont utiles pour la bactérie peuvent être nocives pour la personne qui les absorbe sans le savoir dans la nourriture et la boisson. À l'université de Bordeaux (France), une région productrice de vin, les chercheurs ont étudié la génétique complexe à l'origine de la décarboxylation. Ils ont découvert 4 phases ouvertes de lectures (ORF, pour open reading frames) sur une souche de Lactobacillus hilgardii, une bactérie isolée à partir du vin. Ces phases de lectures étaient localisées sur un plasmide, un fragment d'ADN circulaire séparé du chromosome principal. Ces ORF codent pour des protéines dont l'enzyme décarboxylase elle-même ainsi qu'une enzyme agissant comme échangeur de l'histamine et de son précurseur l'histidine. L'équipe a également recherché des séquences d'ADN similaires à partir d'autres bactéries lactiques. La fermentation est une activité métabolique très commune et les chercheurs ont donc séquencé les gènes d'un large éventail de bactéries. Ces bactéries ont été isolées à partir de vin, de fromage, de la choucroute, du tractus digestif équin et de sauce fermentée de foie de calmar. Des séquences d'ADN similaires ont été trouvées dans toutes les espèces isolées. Par contre, dans le cas des bactéries isolées à partir de fromage ou du tractus digestif équin, les gènes se trouvaient sur le chromosome principal. La localisation des séquences génétiques a des conséquences importantes, tant pour la bactérie que pour le producteur. Les gènes du plasmide circulaire sont transférés à d'autres bactéries au cours du phénomène de conjugaison où l'information génétique est transmise horizontalement, mais cette information peut se perdre au cours de la multiplication bactérienne. La localisation génétique est donc fondamentale du point de vue de la stabilité génétique et de la transmission héréditaire de ces gènes métaboliques. Les scientifiques ont également étudié une bactérie, L. buchineri, isolée à partir du fromage. L'analyse approfondie d'un des gènes, appelé hdcC, a montré qu'il codait pour une protéine membranaire responsable de l'échange histidine/histamine. C'est la première fois que l'on découvre ce gène dans cette bactérie particulière. Les recherches de cette nature pourront probablement mener à l'identification de meilleures souches de bactéries lactiques. L'objectif étant de produire des souches bactériennes ne possédant plus la capacité génétique de production d'amines biogènes. Le consommateur pourrait alors profiter pleinement d'un verre de vin sans histamine.