La recherche révèle de nouveaux indices sur les planètes nées autour de deux soleils
En 2011, des scientifiques ont fait une découverte étonnante qui n’existait auparavant que dans l’imagination: une planète circumbinaire. Contrairement aux planètes comme la Terre, qui tournent autour d’une seule étoile, ces planètes extraordinaires tournent autour de deux étoiles simultanément, connues collectivement sous le nom d’étoiles binaires. Cette découverte a remis en question les théories fondamentales de la formation des planètes. La formation des planètes circumbinaires, longtemps imaginées dans des histoires telles que Tatooine dans Star Wars ou Solaris de Stanislaw Lem, était autrefois considérée comme pratiquement impossible sur la base des outils théoriques disponibles à l’époque. Leur révélation a donc soulevé plusieurs questions.
Prospérer dans le chaos des systèmes à deux étoiles
Pendant des années, les scientifiques ont supposé que les forces gravitationnelles des étoiles binaires empêcheraient les planètes de se former. L’environnement tourbillonnant et instable créé par les étoiles devrait théoriquement perturber le disque de gaz et de poussière à partir duquel les planètes se développent. Plus intrigant encore, des études complémentaires ont révélé que la fréquence des géantes gazeuses circumbinaires autour d’étoiles binaires proches est presque la même que celle des planètes en orbite autour d’étoiles simples. La communauté scientifique a compris qu’il fallait davantage d’exemples de planètes circumbinaires pour élucider ces mystères. Cependant, la détection de telles planètes est un véritable défi. Le projet BEBOP, financé par l’UE, a été mis en place pour poursuivre l’exploration de ces mondes insaisissables. «Tout d’abord, nous avons cherché à prouver qu’une méthode bien connue pour détecter les planètes autour d’étoiles simples – la méthode des vitesses radiales – pouvait également servir à identifier les planètes circumbinaires», note Amaury Triaud, coordinateur du projet. Un autre objectif était de découvrir de nouvelles planètes circumbinaires et de comparer leur population à celle des planètes en orbite autour d’une seule étoile. Ces comparaisons devraient aider les scientifiques à comprendre comment les étoiles binaires affectent la formation des planètes et, à leur tour, éclairer les processus qui ont façonné non seulement les systèmes circumbinaires, mais aussi notre propre système solaire. Pour atteindre leurs objectifs, les chercheurs ont effectué des milliers de mesures spectroscopiques dans les observatoires du désert d’Atacama au Chili et de la région de Provence en France. L’équipe a également recueilli des données photométriques – mesurant les changements de luminosité provoqués par le passage d’une planète devant son étoile – à partir de la base antarctique Concordia. Les chercheurs ont validé leurs méthodes en confirmant avec succès l’existence de planètes circumbinaires déjà connues, puis ont commencé à surveiller des centaines d’étoiles binaires proches, à la recherche de nouvelles découvertes.
Des avancées dans la recherche sur les planètes
Entre 2022 et 2024, BEBOP a franchi une série d’étapes importantes. «Nous sommes entrés dans l’histoire en 2022 en détectant pour la première fois une planète circumbinaire connue à l’aide de la méthode des vitesses radiales. Peu après, en 2023, nous avons découvert une toute nouvelle planète circumbinaire et l’avons baptisée BEBOP-1c», souligne Amaury Triaud. L’équipe a ensuite détecté une planète circumbinaire autour d’une étoile binaire à double ligne, et un certain nombre de nouvelles découvertes sont sur le point d’être annoncées. BEBOP a également fait progresser le domaine en détectant les transits photométriques d’une planète circumbinaire à l’aide de télescopes terrestres, un exploit qui n’avait été réalisé auparavant qu’à l’aide de vaisseaux spatiaux. La capacité de l’équipe à utiliser des installations au sol permet non seulement de réduire les coûts, mais aussi d’offrir un moyen plus durable de collecter des observations astronomiques.
Mieux comprendre la formation des planètes
Ensemble, BEBOP a identifié neuf nouvelles planètes circumbinaires, et quelques autres candidats attendent encore une confirmation. Les chercheurs ont observé que, si les planètes géantes gazeuses sont aussi fréquentes dans les systèmes binaires que dans les systèmes à étoile unique, les planètes très massives (plus de trois fois la masse de Jupiter) sont étonnamment rares dans les systèmes binaires. «Je suis particulièrement enthousiaste à l’idée de découvrir que de nombreuses planètes circumbinaires semblent moins denses que prévu. Si cela est confirmé, cette anomalie pourrait permettre de mieux comprendre la composition de l’atmosphère de ces mondes», conclut Amaury Triaud.
Mots‑clés
BEBOP, planètes, circumbinaire, étoiles binaires, formation des planètes, vitesse radiale
