Des stratégies intelligentes pour protéger les cultures contre les mouches des fruits
Les mouches des fruits (Tephritidae) constituent un problème économique de taille pour les agriculteurs du monde entier, car elles s’attaquent aux cultures vivrières et font perdre des millions d’euros de chiffre d’affaires. Si certaines espèces de mouches des fruits sont originaires d’Europe, les espèces envahissantes représentent une nouvelle menace importante. «Cette situation est en partie due à la mobilité humaine et à l’intensification du commerce», explique Nikolaos Papadopoulos, coordinateur du projet FF-IPM, de l’université de Thessalie, en Grèce. «Les personnes introduisent en Europe des fruits qui sont souvent infestés. Il suffit à la mouche de percer un minuscule trou pour y déposer ses œufs.» L’objectif du projet FF-IPM était de tirer la sonnette d’alarme sur ces menaces et de prendre des mesures pour empêcher l’introduction de deux nouvelles espèces: la mouche de la pêche (Bactrocera zonata) et la mouche orientale des fruits (Bactrocera dorsalis). Le projet entendait également développer de nouvelles approches de lutte pour une espèce déjà installée dans certaines parties du sud de l’Europe, à savoir la mouche méditerranéenne des fruits (Ceratitis capitata, originaire d’Afrique subsaharienne).
Des approches intelligentes de la lutte contre les organismes nuisibles
Dans un premier temps, le projet FF-IPM a généré de nouvelles données biologiques sur les trois espèces cibles. L’objectif était de mieux comprendre le comportement de ces mouches, ainsi que leur capacité à résister à des températures plus fraîches et à des hivers plus longs. Ces informations ont été utilisées pour concevoir des modèles capables de prédire la dispersion probable des espèces envahissantes. «L’étape suivante consistait à mettre au point des outils d’interception», explique Nikolaos Papadopoulos. «Nous voulions identifier les infestations à un stade précoce. La méthode visant à développer une clé d’identification électronique à entrées multiples s’est avérée très fructueuse.» Au lieu d’utiliser une caractéristique à la fois pour identifier une espèce, il est possible d’en utiliser plusieurs en même temps par voie électronique. Des outils d’identification moléculaire ont également été conçus pour accélérer ce processus. Ainsi, au lieu d’attendre des jours pour obtenir des résultats, les inspections peuvent être effectuées en quelques heures. En outre, des pièges à mouches intelligents ont été élaborés, ainsi que des algorithmes permettant d’identifier et de compter automatiquement les espèces envahissantes capturées. Ils peuvent être utilisés aux ports d’entrée ou dans les exploitations agricoles. «Un système d’alerte rapide en temps réel vous envoie les résultats dès qu’une mouche est piégée et identifiée», explique Nikolaos Papadopoulos.
Commercialisation des plateformes de modélisation bioclimatique
La réussite du projet a mené à la création d’une société chargée de commercialiser la plateforme de modélisation bioclimatique. Cette plateforme propose des cartes dynamiques qui prévoient les fenêtres d’opportunité pour les espèces envahissantes cibles. «Nous avons également réussi à développer des modèles pour prédire l’expansion de la mouche méditerranéenne des fruits en Europe», ajoute Nikolaos Papadopoulos. «Un autre système novateur que nous avons mis au point génère des scénarios appropriés de lutte contre les organismes nuisibles pour les agriculteurs, accompagnés d’une estimation des coûts. Ce système a été testé dans des exploitations en Grèce, en Italie et en Espagne, avec des résultats impressionnants.» D’autres outils, tels qu’un «nez» électronique permettant d’intercepter les fruits infestés dans les cargaisons commerciales, ont vu le jour mais nécessitent des recherches supplémentaires et une collaboration avec les parties prenantes.
Une lutte plus intelligente contre les organismes nuisibles pour l’Europe
Selon Nikolaos Papadopoulos, le projet FF-IPM est arrivé à point nommé, car il a contribué à sensibiliser l’opinion publique et à rapprocher du marché des outils avancés qui serviront à protéger les agriculteurs européens. «C’est essentiel non seulement pour les cultures nationales, mais aussi pour les exportations», note-t-il. «Si une cargaison arrive d’Europe et qu’elle est infestée, elle doit souvent être détruite aux frais de l’exportateur. Il s’agit d’un enjeu économique considérable.» En empêchant l’invasion de nouvelles espèces de mouches des fruits, le projet espère contribuer au maintien de la productivité et de la durabilité des industries fruitières européennes. Une meilleure compréhension des mouvements et du comportement des populations de mouches permettra également de mener une lutte plus intelligente contre les organismes nuisibles à long terme.
Mots‑clés
FF-IPM, cultures, mouches des fruits, envahissant, organisme nuisible, bioclimatique, moléculaire