Un blindage avancé du fuselage pourrait aider les avions turbopropulseurs à décoller
Les avions devraient subir d’importants changements technologiques au cours des prochaines décennies. Les normes très strictes en matière d’économie de carburant et d’émissions de CO2 sont des vecteurs d’accélération de la conception de moteurs et de matériaux avancés. Les architectures à rotor ouvert contrarotatif (CROR), également appelées turbopropulseurs, constituent une voie prometteuse pour propulser les jets commerciaux de la prochaine génération; elles pourraient en effet améliorer la consommation de carburant de 20 à 30 %. Pour une intégration sûre, la structure de l’avion doit pouvoir tolérer certaines défaillances des moteurs à soufflante non carénée (rotor ouvert). C’est dans ce contexte que le projet ELEMENT, financé par l’UE, s’est concentré sur des solutions pratiques et des opérations de modélisation visant à atténuer les risques de défaillances de moteurs non confinées. «Des débris à haute énergie pourraient percuter le fuselage et provoquer d’importants dommages structurels susceptibles de compromettre la sécurité de l’avion et des passagers», souligne Jorge López-Puente, coordinateur du projet.
Des modèles virtuels reproduisant les conditions réelles de test
Les chercheurs ont validé le niveau de maturité de plusieurs configurations de blindage qui permettent de minimiser la pondération de pénalité et de protéger les avions contre différentes défaillances du moteur. Des tests d’impact, physiques et virtuels, de débris projetés à grande vitesse depuis le carter du moteur ont été réalisés sur des panneaux simples et des structures d’avion représentatives en grandeur réelle. «Les tests virtuels pourraient réduire le nombre et le coût des tests expérimentaux et, idéalement, les limiter au nombre exact requis pour la certification des avions. Les simulations par ordinateur sont actuellement couramment utilisées dans des conditions statiques, mais pas dans des conditions dynamiques», explique Jorge López-Puente. Les tests virtuels sont la clé d’une conception plus souple des produits et pourraient accélérer le processus de certification des structures, tout en respectant les normes de sécurité. Les chercheurs ont consacré énormément d’efforts à la préparation du dispositif expérimental pour les essais sur éprouvettes. Un polymère renforcé de fibres de carbone a été utilisé pour produire le fragment de prisme représentant les pales, tandis qu’une sphère en acier représentait les fragments métalliques. Différents montages et matériaux ont été développés et testés pour intégrer les structures de blindage rigides et flexibles. Au total, l’équipe a réalisé plus de 300 tests sur éprouvette à l’aide d’un lanceur pneumatique. Des caméras à haute vitesse ont enregistré les énergies absorbées et les vitesses résiduelles des débris dans les structures de blindage.
Test physique d’analyse d’impact sur les structures d’avion
Dans un premier temps, les chercheurs ont effectué des tests expérimentaux physiques réellement représentatifs des modèles virtuels pour évaluer l’impact des débris de moteurs non confinés. Fait important, ces tests n’ont pas nécessité la destruction du moteur. «De grands spécimens représentatifs des structures réelles des avions permettent de réduire considérablement les coûts expérimentaux et d’accroître la répétabilité de nos procédures de test, ce qui est essentiel pour valider les solutions intégrées. À terme, ces développements pourraient contribuer à établir des normes pour des campagnes de tests de certification plus abordables», fait‑il remarquer. «Les tests expérimentaux sont généralement réalisés sur des éprouvettes de dimensions réduites afin de limiter les coûts. Les études portant sur des structures impactées représentatives d’avions de taille réelle sont soit confidentielles, soit inexistantes», ajoute Jorge López-Puente. Par ailleurs, les études actuelles se concentrent généralement sur des fragments métalliques qui ne se déforment pas de manière appréciable après avoir heurté l’avion, ou sur des corps mous tels que des oiseaux qui se désagrègent complètement après avoir heurté le fuselage. Les études portant sur des fragments ou des sections de fuselage en polymères renforcés de fibres de carbone sont rares. Leur comportement mécanique pourrait s’écarter de celui rapporté dans la documentation relative à d’autres matériaux. Les résultats expérimentaux et théoriques du projet sont susceptibles de considérablement faciliter l’intégration du moteur CROR dans les futurs aéronefs. Les avantages potentiels ne se limitent pas au domaine de l’aviation, mais pourraient également s’étendre à d’autres secteurs, tels que le train à grande vitesse, en se concentrant sur la façon dont les ballasts de voie affectent la structure du train.
Mots‑clés
ELEMENT, débris, structure de blindage, défaillance de moteur non confinée, rotor ouvert contrarotatif, test virtuel, polymère renforcé de fibres de carbone