De nouvelles révélations sur les tempêtes de Jupiter
Jupiter est un endroit tourmenté: les vents violents qui balaient la plus grande planète de notre système solaire atteignent régulièrement 360 km/h. Si les courants-jets zonaux de la géante gazeuse sont observés depuis des siècles, nous n’avons jusqu’à présent pas été en mesure d’expliquer ce qui confère une telle puissance à ces flux. Le projet JUMP (JUpiter Modeling Platform), financé par l’UE, a commencé à élucider ce mystère. Mené avec le soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie, le projet a réussi à démontrer que la puissance des jets observés sur Jupiter était dictée par l’énergie de rotation de la planète.
Une dynamique cachée
«Jusqu’à présent, il était admis que la force énergétique des courants-jets zonaux était directement liée à la transformation de l’énergie solaire en sources de mouvement d’écoulement», explique Stefania Espa, professeure agrégée en hydraulique au Département d’ingénierie civile, de construction et d’environnement de l’Université Sapienza de Rome et coordinatrice du projet JUMP. Elle souligne toutefois que cette affirmation ne peut expliquer la raison pour laquelle les courants-jets zonaux de Jupiter sont quatre fois plus puissants que ceux observés sur Terre, alors que Jupiter reçoit 30 fois moins d’énergie solaire. Pour comprendre la dynamique de la formation des courants-jets zonaux, l’équipe de chercheurs a créé le premier modèle de laboratoire d’une géante gazeuse. Ils ont reproduit en laboratoire les courants en action sur Jupiter, simulant les mécanismes qui induisent la formation du courant-jet et étudiant le transfert d’énergie qui se produit.
Combiner expertise et données
Pour simuler les mouvements d’air sur Jupiter ainsi que sur Saturne, une autre géante gazeuse, l’équipe a mis en place une plateforme qui combine laboratoire et modélisation numérique. Elle a ainsi pu collecter de vastes jeux de données qui ont été mis à la disposition des autres chercheurs en libre accès. Les données recueillies en laboratoire et par le biais des simulations numériques ont ensuite été combinées avec les observations planétaires provenant de missions spatiales. Les chercheurs ont également développé un nouvel outil de diagnostic basé sur la vorticité potentielle afin de quantifier la turbulence planétaire. Cela leur a permis de démontrer pour la première fois que le transfert d’énergie dans l’atmosphère de Saturne est quatre fois moins intense que dans celle de Jupiter. En combinant les expertises de spécialistes de la dynamique des fluides, de planétologues et de climatologues, Stefania Espa et ses collègues ont voulu développer un nouveau cadre qui établit un lien entre les courants-jets et l’énergie de rotation d’une planète. «Nous avons démontré que les courants-jets zonaux se développent par l’action couplée des cascades turbulentes et de la courbure sphérique des planètes, ce qu’on appelle l’effet bêta», précise Stefania Espa. «Nous avons également démontré que la magnitude énergétique des jets dépend uniquement de la fréquence de rotation et du rayon planétaire.» Ces résultats pourraient expliquer pourquoi les courants-jets zonaux de Jupiter sont plus puissants que ceux de la Terre, étant donné que Jupiter tourne 2,4 fois plus vite que celle-ci.
Une contribution à la recherche sur le climat
Outre le fait d’améliorer notre connaissance de la dynamique interne de Jupiter, les travaux de l’équipe JUMP pourraient apporter des indices importants pour la recherche sur le climat. «On sait que les courants-jets zonaux jouent un rôle crucial dans l’organisation du système climatique en transportant la chaleur, l’humidité, les gaz et les nutriments autour de la planète», explique Stefania Espa. «Il est essentiel de comprendre en détail la physique qui régit la formation de ces courants-jets pour pouvoir analyser les changements climatiques passés et futurs.»
Mots‑clés
JUMP, Jupiter, géante gazeuse, courant-jet zonal, modèle de laboratoire, modélisation numérique, planète, vorticité potentielle, turbulence, changement climatique