Des cellules transplantées recouvertes de nanomatériaux pour traiter le diabète de manière intelligente
Le pancréas joue un rôle essentiel dans la santé humaine en produisant et en libérant de l’insuline dans la circulation sanguine, afin de réguler les taux de glycémie. Cependant, chez les patients diabétiques, les cellules qui produisent l’insuline, présentes dans des structures spécifiques du pancréas appelées des «îlots», ne fonctionnent pas correctement. «La greffe d’îlots provenant d’un donneur décédé ou d’autres sources, telles que les cellules souches, représente un traitement potentiel pour les personnes atteintes de diabète. Toutefois, le problème réside sur le fait que le système immunitaire détecte les îlots transplantés et les attaque, ce qui provoque leur mort rapide», explique José Carlos Rodríguez-Cabello, professeur de physique de la matière condensée à l’Université de Valladolid, en Espagne, et coordinateur du projet ELASTISLET (Tailored Elastin-like Recombinamers as Advanced Systems for Cell Therapies in Diabetes Mellitus: a Synthetic Biology Approach towards a Bioeffective and Immunoisolated Biosimilar Islet/Cell Niche). Traiter les patients dotés d’îlots transplantés par des immunosuppresseurs ne s’est pas avéré très efficace. En outre, les patients atteints de diabète depuis leur enfance devraient prendre ces immunosuppresseurs à vie. Désormais, des scientifiques financés par l’UE ont développé des cellules spéciales obtenues grâce au génie biologique et recouvertes avec des biomatériaux innovants à l’échelle nanométrique. Ces derniers protègent les cellules du système immunitaire, tout en leur permettant de libérer l’insuline dans la circulation sanguine.
Une technologie de revêtement
Ce revêtement à l’échelle nanométrique n’isole pas totalement les îlots. «Cette technique doit être sélective et assez perméable pour laisser passer l’oxygène, le sang et les nutriments à l’intérieur des cellules, et pour que l’insuline produite par les îlots soit libérée», signale José Carlos Rodríguez-Cabello. «Nous avons examiné la pertinence d’une classe de matériaux innovante, des recombinamères d’élastine, se trouvant à mi-chemin entre les protéines naturelles et le plastique», ajoute José Carlos Rodríguez-Cabello. Conçus et produits de manière synthétique, ces matériaux ressemblent aux protéines avec lesquelles l’îlot peut interagir à l’échelle cellulaire lorsqu’ils sont dans un environnement naturel, tel que l’environnement pancréatique. La technique couche par couche crée un revêtement très fin en plongeant les îlots dans un bain composé d’une solution contenant l’un des composants du mélange. «Ensuite, nous les sortons et les nettoyons un peu, de façon à ce que seulement quelques molécules de ce matériau restent sur la surface et aillent vers le deuxième composant, qui est complémentaire et réagit avec le premier», explique José Carlos Rodríguez-Cabello. Grâce à ces étapes de nettoyage et d’immersion, ils ont obtenu une couche très fine. «Toutefois, nous devions légèrement ajuster les propriétés de diffusion de la couche afin d’atteindre la perméabilité sélective », explique José Carlos Rodríguez-Cabello.
Un revêtement efficace
Le revêtement des cellules a constitué un défi en raison de la surface irrégulière de l’îlot. «Si vous laissez un orifice assez grand pour que la cellule immunitaire le détecte, tout est perdu», explique José Carlos Rodríguez-Cabello. C’est pourquoi l’équipe a conçu un système pour améliorer l’efficacité du revêtement. «Nous n’avons jamais atteint le 100 % d’efficacité en matière de revêtement, mais nous savons que 80 % des îlots que nous transplantons sont bien recouverts et le resteront pendant longtemps.» Les îlots transplantés doivent également être capables d’interagir avec les cellules environnantes et de s’intégrer au tissu de l’hôte. Il est possible d’augmenter cette intégration grâce à une stratégie destinée à vasculariser les cellules favorisant le développement des vaisseaux sanguins, ce qui améliore la survie des îlots et l’échange de nutriments. Quatre-vingt-quinze chercheurs ont travaillé sur ce projet pluridisciplinaire, dont 42 étaient des doctorants, notamment des spécialistes en nanotechnologie, en immunologie, en biologie cellulaire, en biologie synthétique et en génie biologique, ainsi que des médecins dotés de connaissances cliniques. À la fin du projet, l’équipe a obtenu un système fonctionnant dans le cadre d’expériences à court terme chez des animaux de laboratoire et désormais breveté. «Nous effectuons actuellement des tests pour voir si ces implants peuvent maintenir cette capacité sur des périodes plus longues, en vue de l’utiliser sous forme d’injection qui durerait plusieurs années. Cela pourrait même éliminer le besoin de refaire des injections», conclut José Carlos Rodríguez-Cabello.
Mots‑clés
ELASTISLET, cellules, système immunitaire, immunosuppresseurs, diabète, insuline, pancréas, cellules d’îlots, biomatériaux