Un système de prévention pour éviter les potentielles crises financières
La crise financière a fait des ravages dans l’ensemble de l’économie mondiale et a obligé les gouvernements à prendre des mesures importantes, dans certains cas sans précédent, pour limiter les dégâts. Ces mesures comprenaient les sauvetages financiers des grandes institutions financières et l’injection de milliards d’euros dans les économies touchées par la récession pour stimuler la croissance. Le coût social a également été immense, avec le chômage, des salaires stagnants et des politiques d’austérité qui ont causé la misère de millions de personnes. Avec des coûts aussi élevés, il existe un fort désir de s’assurer qu’une crise financière d’une telle ampleur ne se reproduise pas. Le projet EARLINESS.eu (European early warning for systemic risk), financé par l’UE, a donc conçu son Early Warning System (EWS) pour permettre aux responsables politiques et aux régulateurs d’être informés à l’avance des nouveaux risques qui se profilent dans le système financier. Savoir quand sonner l’alarme «Les événements systémiques sont intimement liés à une crise bancaire. Même une crise bancaire limitée peut mener à la faillite des banques impliquées, ce qui cause un effondrement du système tout entier», déclare le docteur Michele Costola, boursier Marie Curie basé au Centre de recherche SAFE de l’Université de Francfort. «Pour faire face aux vulnérabilités du système financier à la suite de la crise, les accords de Bâle III ont été mis en place pour renforcer les règles en matière de fonds propres et de liquidités dans le secteur bancaire.» L’un des aspects les plus importants de la structure concerne le coussin de fonds propres contra-cycliques (CCB), un instrument macro-prudentiel clé qui a pour but de créer une réserve de fonds propres pour protéger le système bancaire contre les périodes de croissance excessive du crédit pouvant conduire à la formation d’un risque systémique. «En résumé, le CCB devrait atténuer le risque d’un resserrement du crédit, qui représente un facteur de déstabilisation de l’économie réelle en entraînant des pertes de crédit supplémentaires dans le système bancaire», explique le docteur Costola. «Savoir quand activer des mécanismes comme le CCB constitue l’énigme majeure à résoudre. C’est pourquoi un EWS, un système qui émet un signal dans le cas où la probabilité qu’une crise franchit un seuil déterminé, peut jouer un rôle crucial dans cet aspect.» Un élément de base EWS L’EWS d’EARLINESS.eu est structuré avec une configuration en «blocs de construction» et est censé avoir une structure hiérarchique. «Cette structure s'avère très pratique, grâce à sa modularité et sa flexibilité qui permettent facilement des interventions spéciales, des extensions et des modifications des mesures de risque systémique mises en œuvre», affirme le docteur Costola. Le système comporte trois niveaux – d’abord, il inclut des données financières et économiques «brutes», en particulier des données financières d’institutions financières uniques et comprend des données boursières (prix, valeur marchande et volume des transactions) et des données relatives aux bilans (c’est-à-dire le ratio d’endettement). Le deuxième niveau du système concerne les micro- et macro-mesures de risque systémique estimées, basées sur les données du premier niveau. Les micro-mesures de risque systémique financier sont utilisées pour détecter la contribution d’une seule institution (une firme) à un évènement systémique tandis les macro-mesures de risque systémique financier représentent le niveau agrégé le plus élevé du système. Pour finir, le troisième niveau analyse la capacité de prédiction de ces mesures de risque systémique (les signaux) en termes de marché et de crises bancaires. «Le but de cette configuration est d’avoir des signaux (préventifs) d’un risque systémique en les identifiant en termes de source et de localisation», commente le professeur Loriana Pelizzon, qui supervise le projet. «Les premiers signes de prévention peuvent être contrôlés au niveau mondial et européen et pour une source donnée de risque systémique. En ce sens, ces signaux peuvent aider à éviter une crise potentielle.» Pour chaque source de risque systémique possible depuis l’intérieur du système financier, l’EWS a des indicateurs alternatifs qui peuvent fournir un signal différent ou similaire durant certaines phases ou qui peuvent en anticiper d’autres, permettant donc à ceux qui utilisent le système d’être toujours en mesure d’avoir une vue d’ensemble de la santé globale du système financier. Les prochaines étapes L’équipe du projet est impatiente de collaborer avec des responsables politiques sur la viabilité et la facilité d’utilisation de leur système. Le docteur Costola a passé sa période de détachement à la division politique correspondante de la Banque centrale européenne (BCE) qui s’occupe du risque systémique, l’étroite collaboration s’étant poursuivie après son séjour à la BCE. Le projet a également organisé un atelier final ouvert à tous à Francfort et qui fera partie de l’ESOF 2018 (European Open Science Forum), la plus grande réunion interdisciplinaire sur la science et l’innovation en Europe. Pour aller de l’avant, le professeur Pelizzon et le docteur Costola poursuivront leur travail chez SAFE et le projet EARLINESS.eu a contribué au développement du Systemic Risk Dashboard (SRDB) du centre de recherche ainsi qu’à la Systemic Risk Platform (SFRP) qui sera bientôt disponible.
Mots‑clés
EARLINESS.eu, système de prévention, EWS, risque systémique, configuration en blocs de construction, crise bancaire