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En vedette - Des technologies pratiques pour des robots agiles

Une équipe de chercheurs de l'UE a développé la première main robotisée à cinq doigts de taille humaine au monde qui peut attraper et manipuler toute une gamme d'objets délicats et à forme étrange comme le font les humains.

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D'après Bill Gates, nous aurons bientôt tous un robot à la maison. Et il semblerait que nous soyons à l'aube de la robotique: des systèmes intelligents et cognitifs font leur apparition un peu partout. Les caméras et capteurs infrarouges sur les consoles de jeux vidéo montrent bien que nous pouvons contrôler certains dispositifs en parlant ou en bougeant les mains. Même certains aspirateurs peuvent faire le ménage dans la maison pendant que vous êtes au travail. Mais l'un des grands problèmes que la communauté de la robotique a tenté de résoudre est celui de la manipulation. «Nous ne parlons pas de pinces», insistent le professeur Bruno Siciliano de l'université de Naples, en Italie (Università degli Studi di Napoli Federico II). «Les robots industriels peuvent déjà attraper des choses et les reposer. Si les robots doivent vraiment transformer la vie tout en collaborant avec les hommes, ils doivent pouvoir manipuler les objets de la même manière que les hommes le font. La manipulation est une tâche complexe que les robots doivent apprendre à maîtriser.» En tant que coordinateur du projet Dexmart (1), le professeur Siciliano a dirigé une équipe de chercheurs en robotique qui a développé une main anthropomorphique robotisée à cinq doigts qui peut tenir des œufs, ramasser et tourner une carte de crédit ou prendre un stylo dans les mains d'une autre personne. «Nous avons utilisé cette main comme modèle», explique le professeur Claudio Melchiorri de l'université de Bologne, en Italie, où le prototype a été développé, «car elle constitue l'exemple parfait de la manipulation en toute agilité.» Le projet souhaitait fabriquer une main ressemblant et bougeant autant que possible comme une main humaine. Jusqu'à présent cependant, aucun laboratoire de robotique n'était parvenu à construire des mains ressemblant aux mains humaines de la bonne taille. «Nous avons suivi une idée simple bien qu'efficace: en utilisant des cordes actionnées par de petits moteurs rapides, nous avons pu exercer des forces de traction dans un espace limité», explique le chercheur en mécatronique Chris May de l'université de la Sarre, en Allemagne. La main robotisée est capable de toucher différents objets, les saisir et les soulever pour les placer dans une nouvelle position. Cette nouvelle solution d'actionneur a été démontrée sur la main développée dans le cadre du projet Dexmart; en effet, elle pouvait manipuler un œuf de Pâques, objet délicat, et une bouteille en verre, relativement lourde. Ces cordes actionnées sont faites de polymères solides et permettent au prototype de la main de soulever une charge de cinq kilogrammes de 30 mm en moins d'une seconde, en se servant de petits moteurs électriques situés sur l'avant-bras et non les articulations, ce qui permet de donner à la main la bonne dimension. «Chaque doigt, composé de trois segments comme un doigt humain, peut être contrôlé avec précision grâce à des tendons individuels», explique le chercheur Gianluca Palli de l'équipe de Bologne. «La capacité de cette main humaine est pratiquement similaire à celle de l'homme, ce qui rend le rêve d'avoir des assistants personnels à domicile, dans une salle de contrôle ou dans un environnement industriel pratiquement réaliste. Nous pensons que l'association de petits moteurs électriques raccordés par des cordes est très intéressante pour d'autres applications.» Un cerveau pratique Cette main a aussi un cerveau. «L'un des objectifs de la robotique, et notamment pour les robots de compagnie et d'assistance dans la société, est de parvenir à ce qu'ils deviennent autonomes», explique le professeur Siciliano. «Les robots doivent répondre à des situations données de manière appropriées et pas forcément préprogrammées. Ils doivent pouvoir décider de l'action à prendre et également travailler le mouvement adéquat pour y parvenir.» Mais quelle est la meilleure façon de donner à ces robots la puissance cognitive? D'après le professeur Siciliano, les robots, tout comme les hommes, doivent apprendre en observant. Une équipe de chercheurs de l'université de Karlsruhe en Allemagne, de l'université de Naples et de la société britannique d'informatique OMG, a utilisé la technologie de traitement d'image pour étudier les détails les plus fins des mouvements des mains de l'homme. Ils ont équipé de marqueurs visuels un gant spécial doté de capteurs qu'ils portent sur leurs mains, et leur ont demandé de procéder à diverses manipulations qui ont été filmées. Les algorithmes de traitement de l'image permettront de suivre les mouvements sur chaque marqueur et d'utiliser ces données pour créer des règles sur la façon dont les mains robotisées doivent manipuler des objets spécifiques. Des mécanismes de contrôle efficaces, sûrs et adaptatifs sont essentiels pour la manipulation robotique complexe. Cependant, essayer de coordonner les mouvements de cinq doigts, tous dotés de quatre articulations, est un procédé extrêmement difficile. «Si vous regardez chaque articulation et ce que chaque moteur est censé faire, vous êtes confrontés à plus de 20 ordres de liberté, ce qui est bien trop complexe», explique le professeur Siciliano. Son groupe de recherche de l'université de Naples s'est inspiré de la biologie pour simplifier le problème. «La recherche sur le contrôle et la coordination des mains humaines montre que l'on ne contrôle pas chaque articulation indépendamment; notre cerveau contrôle toutes les articulations en même temps de manière coordonnée. Les neuroscientifiques ont montré que les positions et mouvements des mains humaines peuvent être simplifiés par ce que l'on appelle les 'synergies de posture'. Ces trois synergies peuvent décrire près de 80% de toutes les actions et positions possibles pour attraper un objet», explique Fanny Ficuciello de l'équipe de Naples. L'équipe de Naples a mis au point un système qui puise ses données dans des capteurs optoélectroniques sur la main (qui mesure la force de la prise), déchiffre les synergies et actionne les mouvements des doigts. La précision de la prise que peuvent créer ces trois synergies est assez remarquable et permet des manipulations extrêmement perfectionnées. Les capteurs optoélectroniques constituent une autre innovation majeure que l'équipe de Dexmart a intégrée dans la main robotisée. Plusieurs capteurs ont été développés pour mesurer les angles, les forces des tendons et les interactions tactiles avec des objets. Au sein du capteur tactile, une analyse computationnelle avancée de l'intensité lumineuse capturée à l'intérieur de plusieurs éléments sensibles permet de calculer les forces exercées sur l'objet par les doigts et également si l'objet échappe à la prise de la main. Les professeurs Giuseppe De Maria et Ciro Natale, ainsi que les chercheurs Salvatore Pirozzi de la Deuxième université de Naples, qui ont développé le capteur, ont déposé une demande de brevet européen pour la technologie. «Le succès de la main de Dexmart réside dans l'intégration de toutes ces nouvelles technologies et concepts, à savoir les capteurs, les actionneurs et les mécanismes de contrôle et d'apprentissage», explique le prof. Siciliano. «Notre main de démonstration a prouvé ses capacités et nous recevons déjà des questions et un grand intérêt de la part de groupes de recherche de nombreux pays. Malgré toutes ces nouvelles technologies, le coût de l'une de ces mains reste bien plus faible que tout ce que l'on trouve sur le marché actuellement, et qui présentent également beaucoup moins de dextérité.» Un prototype de mains et deux doigts totalement dotés de capteurs a été testé sans aucune erreur pendant quatre jours en décembre l'année dernière à RobotVille et sont parvenus à extraire des mains des visiteurs plusieurs objets de toute sorte. Le consortium étudie maintenant la viabilité commerciale de la production de mains totalement fonctionnelles initialement destinées à la communauté universitaire au titre d'études en robotique. Le projet Dexmart a reçu un financement de la recherche de 6,3 millions d'euros (sur un total de 8,1 millions d'euros) au titre du programme spécifique sur les TIC du septième programme-cadre (7e PC) de l'UE. (1) «Dexterous and autonomous dual-arm/hand robotic manipulation with smart sensory-motor skills: A bridge from natural to artificial cognition». Liens utiles: - Site web du projet «Dexterous and autonomous dual-arm/hand robotic manipulation with smart sensory-motor skills: A bridge from natural to artificial cognition» - Fiche d'information du projet Dexmart sur CORDIS Vidéos: - http://wwwiaim.ira.uka.de/users/jaekel/share/Dexmart_FZI_Video.mov - http://www.dexmart.eu/fileadmin/dexmart/public_website/downloads/attentional-CNRS-UNINA_JAN-2012.mpg - http://www.dexmart.eu/fileadmin/dexmart/public_website/downloads/BeerRobot.wmv - http://www.dexmart.eu/fileadmin/dexmart/public_website/downloads/tactile_new.wmv - http://wpage.unina.it/lvillani/ftp/Dexmart/video_unibo_unina.mp4 - http://www.dexmart.eu/fileadmin/dexmart/public_website/downloads/00013-HandsUp.MTS Articles connexes: - En vedette: inspiré par le défi, notre futur robotique