Des matériaux 2D ajustables confirment une théorie récompensée par un prix Nobel
Les hétérostructures sont des empilements de feuilles 2D de graphène et d’autres cristaux. Elles peuvent être liées à des substrats 3D par des forces de van der Waals (vdW) pour créer de nouveaux matériaux aux propriétés électrochimiques exceptionnelles. Le projet 2DMAT4ENERGY, hébergé à l’Université de Manchester, visait à créer des hétérostructures vdW constituées de matériaux 2D aux propriétés électrochimiques ajustables, une voie prometteuse pour des applications dans le domaine des énergies renouvelables. Cette recherche a été entreprise avec le soutien du programme Actions Marie Skłodowska-Curie. «Le potentiel électrochimique des structures vdW n’a pas encore été pleinement exploité, en partie parce que les électrochimistes utilisent rarement les méthodes employées par les physiciens de l’état solide, qui ont jusqu’ici dominé le monde des matériaux 2D», explique Matěj Velický, coordinateur du projet 2DMAT4ENERGY.
Théorie de Marcus-Hush
Le projet a effectué une série de mesures expérimentales pour combler certaines des lacunes en termes de connaissances qui subsistent dans la science fondamentale des matériaux 2D. Pour ce faire, la lithographie par faisceau d’électrons a été utilisée afin de fabriquer une hétérostructure vdW à effet tunnel d’électrons en nitrure de bore hexagonal et en graphite. «Cela a fourni la preuve expérimentale des prédictions de la théorie du transfert d’électrons de Marcus-Hush, récompensée par un prix Nobel, qui n’étaient pas vérifiées à l’époque. Ce fut un moment fort de ma carrière, car cette théorie est l’un des piliers de l’électrochimie moderne», note Matěj Velický. Le projet a également permis de réaliser une percée dans la préparation de carreaux de taille centimétrique de disulfure de molybdène monocouche (MoS2) sur des substrats d’or, maintenus assemblés par de fortes forces vdW. S’appuyant sur la spectroscopie Raman, la spectroscopie photoélectronique à rayons X et l’électrochimie, l’équipe a démontré que les propriétés électroniques du MoS2 pouvaient être ajustées efficacement par l’or sous-jacent. Inversement, la chimie de surface de l’or est modifiée par le MoS2 d’une épaisseur inférieure à un nanomètre. «Ces caractéristiques pourraient contribuer au développement d’hétérostructures utiles pour la modification des électrodes, le stockage d’énergie super capacitif et les applications de détection», ajoute Matěj Velický. «Cela aiderait les dispositifs d’énergie renouvelable à stocker l’énergie de manière à pouvoir fournir de l’électricité à la demande, compensant ainsi la nature intermittente des sources renouvelables comme l’éolien ou le solaire.»
Tests de stress
L’aspect le plus complexe du projet consistait à comprendre l’impact des stimuli externes tels que le champ électrique et la contrainte mécanique sur les hétérostructures. La manipulation de cet impact permet aux ingénieurs «d’ajuster» les propriétés des hétérostructures en fonction des besoins, ce qui les rend exploitables pour différentes applications. Dans ses expériences, l’équipe a utilisé la technique de l’électrolyte électrochimique, un moyen efficace de contrôler la charge électrique dans un matériau, ce qui lui a permis de modifier les propriétés électroniques et optiques de l’hétérostructure. La contrainte mécanique a été étudiée à la fois en concevant un substrat avec une tension appropriée (créée par un décalage délibéré du maillage entre le substrat et les matériaux 2D) et en pliant le support sur lequel reposaient les matériaux 2D. Les résultats du projet ont déjà été adoptés par des laboratoires du monde entier. Matěj Velický ajoute: «À plus long terme, certaines de ces recherches pourraient accélérer la miniaturisation du stockage et de la détection de l’énergie à l’échelle microscopique et nanométrique pour des technologies plus portables, personnalisables et durables.» L’équipe continue actuellement à concentrer ses travaux sur le réglage des matériaux de substrat 2D pour les applications électrocatalytiques, telles que les réactions d’évolution de l’hydrogène et de réduction de l’oxygène utilisées dans les piles à combustible.
Mots‑clés
2DMAT4ENERGY, nano, graphène, van der Waals, hétérostructure, énergie renouvelable, électrocatalytique, Marcus-Hush, Nobel, électrochimie