S’appuyer sur les technologies propres à la nature pour révolutionner la gestion de l’eau
Bien que l’on considère de manière générale que l’Europe dispose de ressources en eau suffisantes, le changement climatique fait de la pénurie d’eau un phénomène de plus en plus répandu. Les régions du sud de l’Europe, en particulier, souffrent de stress hydrique et ont recours au dessalement de l’eau saumâtre et de l’eau de mer pour garantir leur approvisionnement en eau douce. Avec l’augmentation de la demande en eau douce prévue dans les années à venir, l’industrie du dessalement devrait se développer. L’osmose inverse (OI), la technologie de dessalement actuellement la plus utilisée en Europe, s’appuie sur le principe de l’osmose, qui consiste à éliminer le sel en faisant passer l’eau à travers une série de membranes semi-perméables. Il s’agit toutefois d’un procédé énergivore qui contribue de manière significative aux émissions de carbone du continent et qui libère des sous-produits, tels que la saumure, susceptibles de nuire à l’environnement.
Des super purificateurs d’eau naturels à la rescousse
Pour surmonter le défi de la pénurie d’eau et rendre le processus de dessalement plus durable, Aquaporin, une société technologique spécialisée en eau, a développé une membrane biomimétique inspirée des aquaporines, des protéines qui forment des canaux hydriques, destinée à renforcer les membranes polymères standards grâce à ses canaux biologiques. Dans le cadre du projet AMBROSIA, financé par l’UE, l’entreprise a amélioré considérablement cette technologie en produisant la première membrane biomimétique pour l’osmose inverse d’eau saumâtre (BWRO pour «brackish water reverse osmosis») au monde, puis en la faisant passer de l’échelle du laboratoire à l’échelle industrielle. Contribution importante à l’industrie du dessalement, la membrane biomimétique d’AMBROSIA, plus rentable et plus efficace sur le plan énergétique et hydrique que ses concurrentes, a le potentiel pour révolutionner les technologies d’OI actuelles. Le Dr Jörg Vogel, coordinateur du projet, explique comment l’équipe est parvenue à faire passer cette membrane de petits coupons d’une taille ne dépassant pas quelques centimètres carrés, à plusieurs milliers de mètres carrés produits en rouleaux continus: «En trois ans de projet AMBROSIA, nous avons accompli cette tâche et développé des éléments aux normes de l’industrie susceptibles d’égaler, voire de surpasser les produits commercialisés actuellement par des fournisseurs ayant plus de 30 ans d’expérience en matière de fabrication. Cela signifie que nous disposons aujourd’hui d’une membrane BWRO, Aquaporin Inside®, au stade pré-commercial.»
Une technologie de pointe pour l’eau potable et les applications industrielles
Le passage de la petite échelle pilote au revêtement de centaines de mètres de membrane n’a pas été sans difficultés et a nécessité un effort collectif de la part de toute l’entreprise. «Nous avons dû régler un grand nombre de problèmes», explique Jörg Vogel, «notamment pour garantir que nous pouvions transférer les protocoles du laboratoire à la machine et fabriquer un produit stable et cohérent. Cela a impliqué l’intervention du groupe de R&D au Danemark, la réalisation d’autres essais pilotes avec notre équipe à Singapour, ainsi que de nombreux tests sur la machine elle-même en grandeur réelle. Dans le même temps, nos spécialistes des protéines et de la recherche se sont attelés à l’optimisation de notre solution Aquaporin Inside® afin de répondre aux nouvelles exigences de la production à grande échelle, et notre équipe de développement commercial et de vente a travaillé dur pour trouver des clients potentiels et des partenaires d’essai prêts à tester quelque chose de nouveau». Cette membrane biomimétique pose les bases d’un développement de produit ciblé dans les secteurs du dessalement et de l’industrie alimentaire et des boissons, ainsi que dans le domaine en pleine évolution de la filtration BWRO à faible énergie pour l’eau industrielle et municipale. En fait, la membrane joue déjà un rôle clé dans les projets de recherche et d’innovation en Europe et dans d’autres régions. «Elle sera présentée dans le cadre du projet REWAISE d’Horizon 2020, qui optimisera et testera la chimie de la membrane dans des environnements pilotes industriels et quasi-commerciaux», explique Jörg Vogel. «Et nous travaillons aussi actuellement au développement de la filtration BWRO pour la récupération de l’eau et d’autres ressources dans le cadre d’un projet européen portant sur les eaux usées municipales.» Les résultats significatifs obtenus par AMBROSIA apporteront in fine leur contribution aux efforts mondiaux mis en œuvre pour surmonter la pénurie d’eau, l’un des plus grands défis de notre époque.
Mots‑clés
AMBROSIA, eau, membrane, dessalement, BWRO, énergie, Aquaporin, biomimétique, changement climatique, osmose inverse, eau saumâtre