Une recette pour une plus large adhésion du public à l’UE
L’UE et ses citoyens entretiennent une relation fluctuante. Bien sûr, 68 % des citoyens de l’UE considèrent que leur pays a retiré des avantages de l’adhésion à l’UE, si l’on en croit un sondage réalisé en novembre 2018. Mais cette perception généralement positive ne peut être considérée comme acquise. Comme le remarque Claes de Vreese, chercheur principal du projet EUROPINIONS (Causes and consequences of change in public opinion about Europe), financé par le Conseil européen de la recherche: «L’avenir de l’UE repose sur sa légitimité politique et publique.» La véritable question est donc de savoir comment ces opinions se forment et varient, et avec quels effets. EUROPINIONS a voulu y répondre en se concentrant sur le rôle d’une institution qui historiquement a façonné les opinions mais qui a connu une véritable révolution au cours des deux dernières décennies: les médias. «Nous sommes confrontés à plusieurs lacunes de connaissances qu’il nous a semblé essentiel de combler», explique Claes de Vreese. «La première concerne la cartographie et la compréhension de la multidimensionnalité des attitudes de l’UE. Nous savons qu’elle n’est pas simplement noire ou blanche, nous devions par conséquent en avoir une compréhension plus complète. Ensuite, viennent les évolutions de l’environnement médiatique. Nous avons tous accès à différents flux d’informations, mais nous dépendons tous de celles fournies par les médias pour connaître l’UE, alors comment cela fonctionne-t-il? Enfin, nous envisageons l’avenir de l’opinion européenne à travers le prisme de ce à quoi les gens voudraient que l’UE ressemble.» Pour mener à bien leur enquête, Claes de Vreese et son équipe ont eu recours à une combinaison de différentes méthodes. Ils ont utilisé des analyses de contenu des médias qu’ils ont reliées à des données d’enquêtes comparatives. Ils ont également mené de rapides enquêtes éclair pour analyser l’opinion du public sur les événements en cours, ainsi que des recherches expérimentales pour mettre en évidence les dynamiques au niveau des individus plutôt qu’au niveau de groupes sociétaux plus larges (micro-dynamiques).
Tirer les leçons du passé et capitaliser sur le présent
«Notre recherche n’est pas encore terminée, mais nous disposons déjà de quelques résultats importants. Nous pouvons, par exemple, démontrer en quoi le signalement des mauvaises pratiques [toute action de l’UE qui peut être considérée ou interprétée de manière négative] affecte les attitudes de l’UE. Nous avons pu confirmer l’impact des médias sur ces opinions, et nous avons également étudié les conséquences d’une crise. Il s’avère que si une crise liée à l’immigration ou à l’économie peut nuire à l’opinion publique sur l’UE, les effets ne sont pas toujours manifestes. La plupart verront l’UE sous un jour négatif, mais certains peuvent aussi la considérer comme un acteur efficace dans la recherche d’une solution à ces crises», ajoute Claes de Vreese. Dans le cas de la crise de la COVID-19, Claes de Vreese affirme que celle-ci illustre essentiellement combien les politiques nationales et européennes sont étroitement imbriquées. Les citoyens attribuent rarement les compétences exclusivement au niveau de l’UE, et par conséquent leurs opinions sur l’UE dépendent largement de leurs opinions sur la politique nationale. Les données recueillies à un micro-niveau démontrent également que les opinions négatives sur la politique nationale peuvent réduire la confiance dans l’UE, mais pas l’inverse. «En outre, il est important de souligner que la COVID-19 fait essentiellement prendre conscience aux gens à quel point il est avantageux de faire partie d’une communauté internationale aux frontières ouvertes», explique Claes de Vreese. Si les résultats du projet confirment le fait que la plupart des citoyens ne veulent pas quitter l’UE, EUROPINIONS démontre également qu’ils souhaitent bien souvent sa réforme et/ou son amélioration. Dans l’ensemble, Claes de Vreese estime que l’UE devrait éviter de vouloir influencer les opinions et se concentrer essentiellement sur l’information et l’engagement des citoyens. Mettre l’accent sur ses compétences en matière de résolution de crises – par exemple par des échanges transfrontaliers de produits médicaux – et amener les gens à dialoguer sont des bonnes pratiques qui pourraient déboucher sur un soutien et une acceptation plus larges de la part du public.
Mots‑clés
EUROPINIONS, UE, opinion publique, COVID-19