Évolution du papillomavirus – la lutte contre le cancer
La transformation maligne de certains PV a été liée aux oncogènes E5, E6 et E7 présents dans le génome de l’ADN viral. Bien que les protéines exprimées par ces gènes aient fait l’objet d’études approfondies, peu d’informations sur leur origine évolutionnaire sont disponibles.
Étude des différences entre les PV oncogènes et non oncogènes
Avec le soutien du programme Marie Skłowdowska-Curie, ils ont combiné des méthodes informatiques et expérimentales pour étudier des événements spécifiques survenus au cours l’évolution du génome PV. Comme l’explique Ignacio Bravo, coordinateur du projet: «Nous avons appliqué le pouvoir de la pensée évolutionnaire: nous avons étudié les génomes des PV existants et les interactions entre les protéines virales et humaines et reconstruit l’histoire évolutionnaire de ces génomes et ces interactions.» Les chercheurs ont analysé les séquences réelles de tous les gènes dans tous les PV connus et en ont déduit leur histoire par la bio-informatique. Ils ont reconstitué leurs relations évolutionnaires sous forme d’arbre phylogénétique, afin de déterminer si le génome PV ancestral contenait tous les gènes présents dans l’assemblage moderne, ou s’ils avaient été acquis séquentiellement. Il est intéressant de noter que les scientifiques ont découvert qu’il y a 400 millions d’années, le génome des PV ancestrales ne contenait que deux cassettes génétiques: une pour la réplication et une pour la production de virions. Les oncogènes viraux E6 et E7 sont apparus beaucoup plus tard, tandis que l’oncogène E5 semble être apparu de novo à partir d’une séquence d’ADN il y a environ 40 millions d’années. «Cette apparition de nouveaux gènes à partir de zéro est l’une des principales sources de nouveauté évolutionnaire, permettant aux PV de changer le mode d’exploitation de l’hôte», continue M. Bravo. À partir d’une seule lignée virale, trois types de PV ont émergé: l’un causant des verrues de la main, un deuxième causant des verrues génitales, et un troisième causant des lésions des muqueuses pouvant entraîner des cancers. Afin d’étudier le potentiel oncogène des oncogènes PV ancestraux, les chercheurs les ont «ressuscités» expérimentalement par la biologie synthétique. L’introduction dans différentes lignées cellulaires humaines en culture a permis aux scientifiques d’évaluer l’impact de ces oncoprotéines sur l’aptitude cellulaire et d’examiner leur interaction avec les protéines suppressives de tumeurs cellulaires qui pourraient éventuellement entraîner le cancer.
Poursuite des résultats de l’étude ONCOGENEVOL
La recherche sur les cancers associés au PV a énormément progressé au cours des trente dernières années. Bien que la plupart des humains sexuellement actifs soient infectés par les PV, seule une petite partie d’entre eux finira par développer un cancer. Malgré les différences génétiques identifiées entre les PV oncogènes et non oncogènes, la compréhension des facteurs déterminants qui rendent les PV oncogènes est limitée. Le projet ONCOGENEVOL a élargi les connaissances actuelles sur l’origine des gènes et des génomes des PV, en appliquant la médecine évolutionnaire pour comprendre l’interaction à long terme entre les virus très fréquents et les cancers qu’ils causent. Le projet a jeté les bases pour comprendre comment certains PV ont fait évoluer leur potentiel oncogène. Comme l’explique Anouk Willemsen, boursier de recherche Marie Skłowdowska-Curie, «nous avons considérablement amélioré notre compréhension de l’histoire de l’évolution des PV et nos résultats ont un grand potentiel d’exploitation pour le développement futur des vaccins contre le PV». Les plans futurs comprennent l’identification des facteurs déterminants de l’apparition du cancer induit par les PV. Cela sera déterminant dans la conception des interventions de santé publique (y compris le dépistage et la vaccination) visant à réduire l’infection par PV oncogène et donc l’incidence du cancer.
Mots‑clés
ONCOGENEVOL, papillomavirus (PV), évolution, cancer, génome, oncogène, E5, E6, E7