Les véritables effets des nanoparticules dans leur environnement
L’eau de mer offre un cadre unique, car elle contient des ions et de la matière organique qui pourraient interagir avec les nanoparticules (NP) et entraver leur mode d’action. Les chercheurs ont utilisé un ingénieux système naturel d’exposition à l’eau in vivo pour tester les effets des nanoparticules d’oxyde métallique. Le projet SOS-Nano a recouru aux larves d’huîtres japonaises (Crassostrea gigas). La professeure Tamara Galloway, coordinatrice du projet, explique pourquoi la C. gigas a été choisie: «Étant donné que les larves d’huîtres filtrent la nourriture très tôt dans leur développement, elles peuvent être utilisées pour copier la biodisponibilité (absorption par un organisme) et les effets des particules, y compris leur capacité à provoquer du stress oxydatif ou à modifier le développement.» Tester deux modèles différents pour déterminer les effets écotoxiques Deux paradigmes d’activités structurelles ont été examinés. L’un impliquait la mesure de la dissolution et des énergies de bande interdite pour prédire le stress oxydatif. L’autre évaluait la génération de stress oxydatif comme un moyen toxicologique de prédire les problèmes de santé. En outre, l’équipe a testé les ions, les matériaux organiques et les protéines trouvés dans l’eau de mer pour déterminer s’ils amélioraient les effets des NP. Les résultats du projet ont confirmé qu’en plus des propriétés physicochimiques responsables de leur mode d’action, d’autres propriétés doivent être prises en considération pour prédire la toxicité des NP dans l’eau de mer. Données sur le comportement, le sort et l’impact des NP dans des scénarios réalistes Une base de données de projet complète détient des informations sur les principales propriétés physicochimiques des NP modèles, ainsi que sur leurs propriétés secondaires et leur oxydation dans l’eau de mer. Grâce aux techniques d’imagerie de résolution maximale, l’équipe a pu retracer l’ingestion et l’internalisation des NP dans les larves. Des tests de dissolution et la mesure abiotique de l’activité d’oxydoréduction ont permis d’évaluer le véritable mode d’action des NP. Deux NP, l’oxyde de zinc (ZnO) et le dioxyde de manganèse (MnO2), ont été étudiées pour représenter les modes d’action cibles, la dissolution et la bande interdite. Les larves d’huîtres ont souffert d’un niveau élevé de toxicité occasionnée par le ZnO, étant donné que l’eau de mer n’a pas empêché la dissolution. Il est intéressant de noter que les matières organiques peuvent atténuer ce mode d’action. En revanche, les NP de MnO2 dépendent de l’activité d’oxydoréduction en surface et n’étaient pas toxiques dans tous les scénarios d’exposition. «Nos expériences ont mis en lumière la manière dont la salinité peut jouer un rôle important dans le comportement toxicologique des modes d’action liés à l’oxydoréduction dans les milieux marins via la sorption d’ions aux sites réactifs», commente la professeure Galloway. Expansion de la gamme d’ions testés Tout au long du projet de deux ans, les chercheurs du SOS-Nano ont abordé une grande et complexe série d’expériences en recourant à de nombreuses technologies de pointe. «Il était indispensable de parvenir à une coordination parfaite dans le délai imparti, et c'était très difficile», remarque la professeure Galloway. Grâce au projet, il existe désormais une base solide pour valider le paradigme sur la toxicité de deux NP d’oxyde métallique dans la larve embryonnaire d’huître, un organisme incroyablement sensible aux effets des NP. Les prochains tests s’appuieront sur ces conclusions et élargiront la gamme de nanomatériaux testés, qui partagent le même mode d’action, mais diffèrent dans leur capacité à interagir avec les composants de l’eau de mer. Basées sur les observations de l’internalisation dans les larves, les modifications apportées aux propriétés physicochimiques des NP lors de leur trajet du milieu marin vers le milieu biologique, et inversement, fourniraient également des données précieuses sur la toxicité des NP. L’absence d’une bonne évaluation du risque environnemental et humain des NP constitue aujourd’hui la principale limite à la croissance sûre de ce secteur économique, l’une des six technologies clés génériques de l’UE sélectionnées par la Commission européenne. En tant que tel, le projet SOS-Nano a abordé une des questions les plus brûlantes de l’éconanotoxicologie. «Dès que nous comprendrons mieux les mécanismes inhérents au potentiel d’oxydation des NP, nous pourrons parvenir à de nouveaux paradigmes ou ajuster les modèles existants», prédit la professeure Galloway.
Mots‑clés
SOS-Nano, NP, eau de mer, stress oxydatif, dissolution, oxyde métallique