Prévention des épidémies de dengue
Les études épidémiologiques ont montré que la plupart des infections par le virus de la dengue étaient asymptomatiques, échappant ainsi aux systèmes de surveillance existants. Les stratégies actuelles de lutte contre le vecteur de la maladie n’ont qu’un succès limité et n’offrent pas de solutions à long terme. La meilleure prise en charge clinique des cas sévères de la maladie a permis de réduire le taux de mortalité mais celle-ci ne peut à elle seule réduire la transmission de la dengue. Le projet DENFREE, financé par l'UE, a associé différentes expertises pluridisciplinaires afin d’étudier le rôle de l’infection asymptomatique de la dengue sur la transmission du virus. Les résultats obtenus par analyse du schéma spatiotemporel de propagation du virus ont ainsi souligné l'importance des mouvements humains sur la transmission virale et les données de Polynésie française ont montré que la dengue ne se maintenait qu’en se propageant d’une île à l’autre. D'un point de vue scientifique, le consortium a étudié les interactions entre l'hôte, le vecteur et le virus DENV et révélé que la diffusion virale était similaire dans différentes régions géographiques. L'élément clé de la transmission virale s'est avéré être la population de moustiques comme en témoignent les expériences ayant imposé une pression sélective et un renforcement de la transmission. Si l’on s’intéresse à la variabilité génétique, les patients atteints d'une infection secondaire présentaient une plus grande variabilité des gènes non structurels que les patients atteints d'infections primaires. Ces résultats suggèrent que lors de la progression de l’épidémie, des changements génétiques se sont produits qui ont affecté l’aptitude de la souche virale. De manière tout à fait intéressante, les chercheurs ont pu identifier des différences au niveau de la réponse immunitaire des individus asymptomatiques comparés aux patients atteints de la maladie avec des lymphocytes T activés chez les uns et des plasmablastes pour les seconds. Ces résultats confirment le rôle protecteur des lymphocytes T et apportent un nouveau concept pour le développement d’un vaccin contre la dengue. Une analyse génomique complète sur des patients venant de Cuba ou de Thaïlande a permis d’identifier des gènes du métabolisme lipidique ou appartenant aux voies de signalisation xénobiotiques, comme étant impliqués dans la pathogenèse de la maladie. En s’appuyant sur ces marqueurs génétiques, le consortium a montré que les populations européennes étaient plus exposées que les populations d'Asie du Sud-Est à une pathologie grave de la dengue alors qu'elles étaient mieux protégées contre une dengue classique. Par ailleurs, les chercheurs ont déployé des efforts considérables pour obtenir un essai diagnostic in situ et une méthode de détection hautement sensible basée sur des anticorps. Les travaux du projet DENFREE nous fournissent ainsi des informations essentielles quant à la compétence européenne en matière de vecteurs, les marqueurs génétiques viraux pour une adaptation aux moustiques européens et la susceptibilité génétique spécifique de la population face à une dengue classique ou grave. Combinés aux nouvelles méthodes de détection et stratégies d'actions élaborées par le projet, ces travaux nous permettent d’espérer un meilleur contrôle de la transmission de la dengue.
Mots‑clés
Virus de la dengue, moustique, DENFREE, lymphocytes T, diagnostic sur le lieu d'intervention