Évolution de l'informatique quantique
La recherche en matière d'ordinateurs quantiques capables d'effectuer avec une extrême rapidité des calculs très complexes basés sur les propriétés intéressantes des particules quantiques s'est heurtée à un obstacle majeur sous la forme d'une «décohérence». Les ordinateurs traditionnels s'appuient sur les «bits» classiques pour coder l'information alors que les ordinateurs quantiques s'appuient sur le qubit, l'état quantique représentant la plus petite unité de stockage d'information quantique. Contrairement au bit classique qui est soit dans l'état 0 ou 1, le qubit peut se trouver dans une superposition de ces deux états, ce qui permet théoriquement un traitement vraiment parallèle et d'augmenter considérablement la capacité informatique. Cependant, une décohérence, ou des changements aléatoires dans les états quantiques suite aux interactions avec l'environnement, rend difficile le contrôle et l'exploitation de l'unité qubit. En ce qui concerne les molécules magnétiques, une théorie prévoit trois contributions principales à la décohérence, à savoir celle des spins nucléaires, des interactions bipolaires intermoléculaires et des phonons. Des chercheurs européens ont lancé le projet DECMMQUBIT («Decoherence in magnetic molecules as qubits») en vue d'étudier le phénomène ci-dessus dans les systèmes qubit de spin des aimants moléculaires. Le but était d'améliorer la compréhension et la minimisation de la décohérence afin de repousser les limites de l'informatique quantique. Les scientifiques ont commencé par choisir deux molécules (polyoxométalates) capables de subir une synthèse sans spins nucléaires. Des études théoriques ont révélé qu'elles étaient tout à fait susceptibles de montrer un comportement d'aimant à une molécule (SMM) et étaient donc d'excellentes candidates pour le qubit de spin. Les chercheurs ont ensuite procédé à une synthèse et une caractérisation magnétique des SMM. L'étape suivante a consisté à préparer des échantillons purs et magnétiquement dilués avec lesquels ils ont démontré que l'application d'un champ magnétique transversal diminuait la contribution des interactions bipolaires à la décohérence. Enfin, des constantes de couplage entre phonons (quanta d'énergie vibratoire) et différents types de systèmes à deux niveaux de bromure de potassium (KBr), cyanure (CN) ont été étudiées, les calculs prenant en charge les valeurs mesurées expérimentalement. Dans l'ensemble, l'équipe du projet DECMMQUBIT a réalisé des études expérimentales et théoriques sur les trois principaux facteurs contribuant à la décohérence du qubit. La poursuite des conclusions du projet devrait faciliter davantage la compréhension des molécules magnétiques en tant qu'objets quantiques et aider à surmonter l'obstacle au développement de l'informatique quantique de demain.