En vedette - Maintenir la compétitivité de l'Europe dans le domaine des communications sans fil
«L'industrie européenne est confrontée au paradoxe de l'œuf et de la poule dans le secteur des communications sans fil et mobiles», explique Marco Luise, professeur de télécommunications à l'université de Pise, en Italie. «Les sociétés ont investi beaucoup de temps, d'argent et d'efforts dans le développement d'applications et de technologies qui peuvent rapidement être commercialisées et elles en ont profité. Mais l'attention qu'elles ont portée à court terme s'est faite aux dépends de la recherche fondamentale à long terme: elles ont ainsi généré un lent déclin dans l'innovation des produits». Des produits et technologies moins innovants (des téléphones intelligents aux autres appareils mobiles en passant par les protocoles sans fil et les systèmes de transmission des données) confrontent l'Europe au risque de perdre son avantage concurrentiel dans le domaine, suite à la croissance des produits et technologies compétitifs, en particulier en Asie. «Il s'agit d'une pente sans fin qu'il est très dur de remonter une fois lancé», explique le professeur Luise. Mais aujourd'hui, les chercheurs européens ont décidé de remonter cette pente. Depuis plus de trois ans, 18 universités et instituts de recherche de 14 pays ont coopéré dans la recherche fondamentale dans le cadre du projet Newcom++ («Network of excellence in wireless communications»). Des technologies révolutionnaires qui vont au-delà du 4G Parmi les nombreuses découvertes révolutionnaires qui émergeront de ce réseau d'excellence figure une nouvelle catégorie de codes de canaux pour la transmission fiable de données par le biais de réseaux sans fil. On les appelle les codes polaires, et ils promettent de grandes avancées en terme d'augmentation de la largeur de bande, permettant aux dispositifs mobiles de considérablement augmenter la vitesse de transmission des données, et il s'agit des premiers codes qui atteignent la capacité à pouvoir être décodés. Développés récemment par Erdal Arikan de l'université Bilkent en Turquie, l'un des partenaires de Newcom++, ces travaux ont obtenu le Best Paper Award (prix des meilleurs travaux) de la société de la théorie de l'information. «Le débit est une question clé: si nous disposons d'une connexion internet d'un mégabit (Mb) aujourd'hui, il nous faudra une connexion de 10 Mb demain et de 100 Mb après-demain», explique le professeur Luise. «Ainsi, les technologies pouvant faire plus avec la largeur de bande et les canaux disponibles sont primordiales.» Les partenaires du projet ont travaillé sur une gamme de technologies qui vont bien au-delà des connaissances actuelles en matière de communications mobiles et sans fil. Par exemple, les chercheurs de Newcom++ de l'université polytechnique de Turin, en Italie, ont travaillé sur des algorithmes avancés de décodage pour la technologie «entrées multiples, sorties multiples» (MIMO, multiple-input and multiple-output) dans laquelle les dispositifs de transmission et de réception possèdent plusieurs antennes pour améliorer la communication. Les nouveaux téléphones intelligents de quatrième génération (4G) LTE utilisent déjà cette technologie MIMO, mais les chercheurs de Newcom++ ont développé des techniques pour améliorer la performance des systèmes à plusieurs antennes à bas prix. D'autres se concentrent sur la communication coopérative, qui permet à un dispositif mobile MIMO de coopérer avec d'autres dispositifs mobiles à proximité pour se connecter à une station de base (une approche à plusieurs stops qui d'une part étend la zone de couverture et d'autre part augmente la vitesse de transmission). Newcom++ est une initiative de recherche collaborative soutenue par un financement de 5 millions d'euros de la Commission européenne; elle poursuit les travaux de son prédécesseur, Newcom, qui a contribué à poser les bases d'une collaboration à grande échelle entre chercheurs européens dans les communications sans fil et mobiles. L'équipe du projet a également contribué à la formation de jeunes chercheurs dans le domaine, a développé une plateforme en ligne de collaboration et une base de données pour partager les connaissances et a produit une série de manuels et de publications qui analysent en profondeur les besoins, enjeux et solutions futurs. Au cours des années à venir, les résultats de leurs travaux devraient jouer un rôle important allant d'une connexion Internet sans fil moins chère, plus rapide et plus sûre au développement de la capacité, de la gamme et de la fonctionnalité des réseaux mobiles. «Les technologies que nous avons développé vont au-delà de la norme d'évolution à long terme LTE (Long Term Evolution) du 4G qui est déployée actuellement pour les communications mobiles; il ne s'agit pas de technologies de prochaine génération mais plutôt de technologies 'd'après la prochaine génération'», déclare le professeur Luise, directeur technique de Newcom++. «En travaillant avec eux, nous espérons aider l'Europe à retrouver sa place dans le domaine des communications sans fil et mobiles.» «Une grande partie de ces recherches, qui portent sur la capacité, la largeur de bande, la localisation et la sécurité par exemple, pourraient être mises en œuvre pour la prochaine génération de téléphones intelligents après le 4G; cependant, certaines vont au-delà de cette technologie, touchant même à des zones abstraites telles que la théorie de l'information», fait-il remarquer. Former la nouvelle génération de chercheurs L'approche à long terme de l'équipe de Newcom++ s'est également révélée importante dans un autre aspect fondamental du projet: la formation de jeunes chercheurs dans le domaine des communications mobiles et sans fil. Durant les trois ans et demi de fonctionnement officiel du réseau, une série de stages d'été et d'hiver ont été organisés dans différentes villes d'Europe. Dans chaque école, entre 40 et 50 étudiants ont eu la chance de rencontrer et d'apprendre des meilleurs chercheurs au monde dans le domaine. «Si nous souhaitons que l'Europe reste un leader en matière de technologie des communications sur le long terme, nous devons nous assurer que nous disposons de nouveaux chercheurs et de nouvelles idées pour mener de front l'innovation», ajoute le professeur Luise. De nombreux chercheurs participant au réseau d'excellence continuent d'utiliser la plateforme collaborative en ligne ViCE-WiCom («Virtual center of excellence on wireless communications») qui a été mise en œuvre par les partenaires afin de renforcer le partage des connaissances et la collaboration entre universités et instituts de recherche. La plateforme a même été utilisée pour un cours de doctorat à distance. Parmi les autres résultats tangibles de cette attitude coopérative vers la recherche figurent deux manuels, «The NEWCOM++ Vision Book: Perspectives of Research on Wireless Communications in Europe» et «Satellite and Terrestrial Radio Positioning Techniques», qui ont été publiés par différentes équipes participant au projet. Les partenaires ont également créé un groupe à but non lucratif basé en Belgique, Euracon (European Association for Communications and Networking), qui se concentrera principalement sur l'éducation, la formation et l'organisation d'évènements dans le domaine des communications mobiles et sans fil. Un projet de suivi qui visait également à créer un réseau de laboratoires européens portait sur le développement plus poussé de technologies sans fil. Newcom++ a reçu un financement de la recherche au titre du septième programme-cadre (7e PC) de l'Union européenne. Liens utiles: - site web du projet - Archives des données du projet sur CORDIS - Projets du 7e PC sur les Réseaux futurs Articles connexes: - Des économies d'énergie pour les télécommunications mobiles 4G - Des mathématiciens financés par l'UE facilitent la conception de composants radiofréquence