Un guichet unique pour garantir la sécurité et la durabilité des nanomatériaux
Bien qu’elles soient souvent présentées comme des technologies clés susceptibles de révolutionner de nombreuses industries, les nanotechnologies suscitent encore des inquiétudes. Les minuscules nanoparticules utilisées dans un large éventail de produits, de la crème solaire à l’administration de médicaments, peuvent franchir les barrières internes de protection des organismes vivants, comme par exemple les membranes sécrétrices de mucus. Une fois inhalées ou ingérées, elles peuvent affecter les tissus du cerveau, des poumons ou du cœur. Elles peuvent également s’infiltrer dans le sol ou l’eau, créant une menace potentielle pour les organismes aquatiques et terrestres. «Avant de pouvoir gérer le risque lié aux nanoparticules, nous devons d’abord mieux comprendre leurs propriétés physicochimiques et leur impact durant l’exposition. Nous pourrons alors proposer des mesures d’atténuation appropriées», explique Carlos Rumbo Lorenzo, coordinateur du projet DIAGONAL. Parallèlement à cet objectif, Carlos Rumbo et ses collègues de l’université de Burgos, en Espagne, ont entrepris de mieux quantifier les implications des nanomatériaux en matière de durabilité. «Il est important de prendre en compte de manière précise les avantages globaux de toute utilisation future à grande échelle», explique Carlos Rumbo. Le projet a déjà publié 28 articles de revue scientifique à comité de lecture et d’autres sont en préparation. Il a également élaboré des outils destinés à aider les décideurs industriels à appliquer aux nanomatériaux les principes de sécurité et de durabilité par la conception (SSbD).
Caractériser les nanoparticules
La plupart des recherches sur les nanoparticules portent sur les nanoformes vierges ou simples. DIAGONAL concentré ses recherches sur les nanomatériaux multicomposants plus complexes (MCNM) et les nanomatériaux à haut rapport d’aspect (HARN). Ils les ont étudiés dans le cadre de sept démonstrateurs industriels, couvrant les cosmétiques, la santé, l’automobile, l’aérospatiale, le pétrole et le gaz, les textiles et l’électronique imprimée. Les démonstrateurs ont fourni des échantillons de nanoparticules, afin que l’équipe de Carlos Rumbo puisse étudier leurs propriétés physicochimiques, telles que leur composition, leur taille et leur chimie de surface. Parallèlement, des modèles cellulaires in vitro réalistes, dont des cellules pulmonaires, gastro-intestinales, cutanées et immunitaires, ont été conçus pour étudier l’impact de l’exposition humaine. Les chercheurs ont également effectué une surveillance sur site dans les installations industrielles des démonstrateurs afin de recueillir des données détaillées sur le lieu de travail. Pour évaluer les implications écologiques, l’équipe a étudié l’impact des nanoparticules sur des espèces modèles sélectionnées dans différents habitats: vers (sol), biofilm de Pseudomonas putida (sédiments), daphnies et algues (eau douce). Les données combinées, complétées par des techniques de modélisation moléculaire et d’apprentissage automatique, ont ensuite fournit de précieuses informations à DIAGONAL. Carlos Rumbo explique: «Nos modèles caractérisent la structure des nanoparticules et simulent leur comportement dans des environnements réels. Grâce à l’IA, nous pouvons désormais créer des modèles pour prévoir la toxicité d’un MCNM ou d’un HARN donné».
La confiance dans les nanotechnologies
Les travaux expérimentaux et de modélisation de DIAGONAL ont inspiré le développement de stratégies SSbD, validées par les partenaires industriels du projet et déployées par les démonstrateurs. Ils sont accessibles via l’outil d’aide à la décision de DIAGONAL qui évalue la sécurité relative des nanoparticules dans des scénarios particuliers, avant de proposer des stratégies spécifiques de SSbD ainsi que des scores d’impact anticipé. Il est essentiel que ces scores reflètent des préoccupations qui vont au-delà de la seule sécurité et englobent des impacts environnementaux, économiques et sociaux plus larges. «En évaluant l’impact des stratégies SSbD de l’outil sur les enjeux de durabilité dans trois études de cas, nous avons observé des améliorations considérables dans tous les domaines. Dans une étude de cas, nous avons calculé que la reconception des nanoparticules d’oxyde de zinc permettait de réduire de 68 % les risques environnementaux et de 87 % les risques sociaux, et également de diminuer les coûts de 25 %», ajoute Sonia Martel Martin, coordinatrice du projet. L’outil d’aide à la décision est hébergé sur la plateforme cloud de DIAGONAL, avec d’autres outils web de gestion des risques. «Notre guichet unique offre un accès ouvert aux informations les plus récentes pour les recommandations de gestion des risques spécifiques au secteur. Les bases de données ouvertes et les collaborations en cours permettront de poursuivre dans cette voie», ajoute Carlos Rumbo. À cette fin, tout en continuant à développer les outils de soutien, l’équipe participe déjà à des activités conjointes avec des projets SSbD de même nature, tels que SUNRISE et DESIDERATA.
Mots‑clés
DIAGONAL, sûr et durable par conception, exposition, risque, nanoparticules, HARN, MCNM, multicomposants, durabilité, modélisation, nanotechnologie, sécurité