Sonder l’inflation cosmique dans l’univers primordial
Dans les premières fractions de seconde qui ont suivi le Big Bang, l’univers s’est développé à une vitesse stupéfiante. Les scientifiques utilisent une théorie connue sous le nom d’inflation cosmique pour expliquer cette expansion rapide. L’inflation était alimentée par ce que l’on appelle un champ d’inflation, qui s’est finalement détendu pour atteindre un état de moindre énergie. L’énergie qu’il contient s’est transformée en particules, en lumière et en matière, ce qui a donné naissance, au cours de milliards d’années, à toutes les galaxies, étoiles et phénomènes cosmiques que nous pouvons observer aujourd’hui. Les modèles d’inflation en physique des hautes énergies comportent plusieurs champs d’inflation. Sébastien Renaux-Petel, du Centre national français de la recherche scientifique (CNRS), chargé de recherche à l’Institut d’Astrophysique de Paris, a précédemment étudié la géométrie de ces champs et la manière dont elle affectait la stabilité de l’inflation cosmique. Sébastien Renaux-Petel et ses collègues ont constaté une déstabilisation géométrique de l’inflation, susceptible d’affecter tous les modèles. Dans le cadre du projet GEODESI, financé par le Conseil européen de la recherche, Sébastien Renaux-Petel et son équipe ont poursuivi leurs travaux, sondant ces processus géométriques fondamentaux à la genèse de notre univers connu. «L’instabilité ne met pas fin à l’inflation», affirme Sébastien Renaux-Petel. «L’inflation se poursuit, mais d’une manière inhabituelle que nous appelons phase d’inflation déviée.»
L’inflation cosmique déviée
L’équipe a étudié cette phase de l’inflation au cours de la première partie du projet et a trouvé de nouveaux mécanismes pour générer l’inflation cosmologique. Au fur et à mesure de l’expansion de l’univers, des fluctuations de densité et d’énergie ont provoqué des ondulations dans l’espace et modifié la forme de la matière. Des modèles simples d’inflation cosmique suggèrent que ces ondulations avaient une distribution gaussienne et se sont répandues uniformément. En revanche, les travaux de l’équipe ont montré que l’inflation déviée s’écarte considérablement des statistiques gaussiennes et qu’elle est d’un type nouveau, et ils ont plus généralement élargi notre connaissance de ces non-gaussianités primordiales. «Inspirés par cette idée, nous avons découvert un nouveau mécanisme pour générer des trous noirs primordiaux», fait remarquer Sébastien Renaux-Petel.
Sonder les âges sombres de l’inflation
Ces avancées ont conduit l’équipe à identifier de nouveaux signaux d’ondes gravitationnelles, des ondulations de l’espace-temps qui portent des informations sur l’univers primordial. Ils ont réalisé qu’ils ouvraient un nouveau domaine de la cosmologie et qu’ils étaient en mesure de sonder les «âges sombres de l’inflation», qui sont normalement inaccessibles. Ces travaux ont attiré l’attention, et l’équipe a été impliquée dans la mission LISA de l’Agence spatiale européenne, dont le lancement est prévu en 2035 et qui transportera pour la première fois un détecteur d’ondes gravitationnelles dans l’espace. En outre, les chercheurs ont mis au point des moyens de sonder les âges sombres de l’inflation à l’aide de simulations numériques. Grâce à cet outil, ils ont identifié un nouveau phénomène connu sous le nom d’«effet papillon inflationniste», dans un article publié dans la prestigieuse revue «Physical Review Letters». «Cet article marque une sorte de percée dans l’utilisation de simulations pour étudier l’inflation», ajoute-t-il.
Le flot cosmologique
Une autre avancée majeure du projet a été le développement d’un cadre informatique qui détermine systématiquement les propriétés statistiques des ondulations générées dans les théories de l’univers primordial. Ce code, connu sous le nom de CosmoFlow, a permis aux chercheurs de faire des prédictions dans des théories qui étaient hors de portée avec d’autres moyens. L’équipe a reçu le prix Buchalter de cosmologie 2023 pour ses travaux, eux aussi publiés dans «Physical Review Letters». Le code CosmoFlow est ouvert pour faire avancer la recherche. «Nous promouvons son utilisation, afin qu’il devienne un outil répandu pour la communauté cosmologique», note Sébastien Renaux-Petel, qui a également reçu la médaille de bronze 2024 du CNRS pour le travail effectué dans le cadre du projet.
Mots‑clés
GEODESI, cosmique, inflation, univers, trous noirs, cosmologique, communauté