Une technologie de construction réutilisable réduit les émissions de CO2 et les déchets
Comme l’indique un récent rapport de l’OCDE, l’acier et le ciment, deux des matériaux de construction les plus courants, sont conjointement responsables d’environ 15 % des «émissions de dioxyde de carbone dues à la combustion dans les systèmes énergétiques et les procédés industriels au niveau mondial». Limiter la quantité d’acier et de béton utilisée pourrait contribuer de manière significative à la réduction des émissions de CO2. Par ailleurs, les déchets issus des démolitions finissent souvent dans des décharges, ce qui aggrave la pollution. Le projet REUSE, soutenu par le programme Actions Marie Skłodowska-Curie, a mis au point deux nouveaux connecteurs destinés à être utilisés dans des bâtiments composites acier-béton démontables. «Cela résout le problème de la démolition, car les composants du bâtiment peuvent être facilement désassemblés et réutilisés. C’est mieux que le recyclage, qui produit toujours du CO2», explique George Vasdravellis, directeur des recherches.
Deux modèles de connecteurs
En général, les pratiques de construction rendent quasiment impossibles le désassemblage et la réutilisation des composants structurels. Alors que les bâtiments sont habituellement conçus pour une durée de vie comprise entre 40 et 50 ans, il s’avère souvent nécessaire de les moderniser ou de les mettre à niveau bien plus tôt. Il convient également d’évoquer le cas des bâtiments temporaires, construits par exemple pour des événements ponctuels comme les Jeux olympiques. Ces bâtiments deviennent souvent superflus après l’événement, et sont donc simplement démolis, ce qui génère davantage de déchets. Les bâtiments composites sont constitués de sections en acier et de dalles en béton préfabriqué. Ces derniers sont reliés par des connecteurs, appelés «shear connectors» en anglais (littéralement: connecteurs de cisaillement), car ils sont capables de résister aux forces de cisaillement, ce qui rend les poutres composites ainsi obtenues beaucoup plus solides qu’elles ne le seraient sans connecteurs. Toutefois, les connecteurs traditionnels sont soudés sur l’acier et encastrés dans le béton, ce qui les rend impossibles à démanteler et donc à réutiliser. Les connecteurs démontables de REUSE permettent de séparer facilement les dalles et les sections en acier afin de les réutiliser dans de nouveaux projets. Par ailleurs, la conception des éléments de construction les rend également faciles à fabriquer hors site, pour une installation rapide sur place. Au final, le projet a conçu deux types de connecteurs: une version boulonnée et une version hybride boulonnée-soudée, toutes deux démontables. Des essais en laboratoire ont permis d’évaluer le comportement des connecteurs en fonction de leurs propriétés structurelles et de leurs réactions aux contraintes. Des modèles informatiques ont ensuite été calibrés en fonction des résultats de ces essais, puis une série de scénarios probables pour tester la fiabilité des connecteurs ont été simulés. L’équipe a enfin procédé à des tests mécaniques de type «push-out» (expulsion des fibres). Ces derniers permettent de vérifier la résistance et la résilience des matériaux composites, afin de s’assurer de leur conformité aux normes européennes, et notamment à l’Eurocode 4. «Nos essais ont démontré que nos deux connecteurs démontables pouvaient être conçus avec des propriétés structurelles avantageuses pour les bâtiments ou les ponts composites acier-béton», ajoute George Vasdravellis.
Des avantages pour l’environnement et la santé humaine
L’utilisation de structures démontables et réutilisables dans le secteur de la construction, comme celles du projet REUSE, réduira les émissions de CO2 et la quantité de déchets mis en décharge à la suite de démolitions inutiles, ce qui profitera à la fois à l’environnement et à la santé humaine. Plus généralement, adopter des éléments de construction «conçus pour être réutilisés» dans le secteur du bâtiment aidera à atteindre les objectifs environnementaux ambitieux fixés par l’UE. «Nos conceptions sont nouvelles et remplissent toutes les conditions requises en termes d’application pratique, de performances structurelles et de durabilité», fait remarquer George Vasdravellis. Pour rapprocher la technologie de la phase de commercialisation, l’équipe continuera à tester ses conceptions sur des poutres et des poutrelles en taille réelle. Cela permettra d’évaluer de manière plus approfondie des facteurs tels que la résistance à la fatigue en cas de charge répétée, qui concerne en particulier les ponts, ou la résistance aux charges cycliques, qui revêt une grande importance dans les régions sismiques. Par ailleurs, une analyse plus poussée du cycle de vie des structures utilisant la technologie proposée sera nécessaire pour accélérer le développement des politiques et procédures qu’il convient d’appliquer aux dispositifs réutilisables/démontables.
Mots‑clés
REUSE, construction, béton, acier, composite, réutilisable, durable, déchets, démolition