Des micro-organismes qui révèlent l’emplacement des réserves de pétrole et de gaz
Mais même en disposant de la meilleure technologie existante, les sociétés de ce secteur peuvent avoir besoin de forer plusieurs puits avant de trouver du pétrole ou du gaz. Or ce processus est extrêmement coûteux car il nécessite un énorme effort logistique, outre le fait qu’il affecte également fortement l’environnement. Chaque puits de schiste non foré permet d’économiser 6 millions de dollars, ainsi que 10 millions de litres d’eau, 100 000 litres de produits chimiques et 4 000 trajets de camion. Quant à l’exploration en mer, elle est encore bien plus onéreuse car elle implique le recours à des plates-formes offshore et à des navires de ravitaillement coûteux, sans compter les dommages causés à l’écosystème. Le projet Biodentify, financé par l’UE, a mis au point une technologie révolutionnaire qui permet d’éviter les forages inutiles en prédisant si un gisement de pétrole ou de gaz naturel sera suffisamment productif. «Biodentify utilise l’ADN d’échantillons de sol prélevés à 30 cm de profondeur pour identifier une accumulation de pétrole ou de gaz avant le forage, avec une précision de 70 % minimum», déclare Jonathan Zwaan, coordinateur du projet.
Comment cela fonctionne
Toute accumulation de pétrole ou de gaz produit des microbulles qui remontent à travers la roche en passant par des microfissures jusqu’à atteindre la surface. Bien que l’infiltration soit trop faible pour être mesurée directement, elle influence la composition des microorganismes vivant dans le sol. En extrayant l’ADN d’échantillons de sol de surface, les chercheurs de Biodentify ont pu obtenir une empreinte ADN composée des biomarqueurs des différentes espèces bactériennes présentes. «Nous extrayons d’abord l’ADN, produisant de l’ARNr 16S marquée et nous l’utilisons pour identifier toutes les espèces bactériennes présentes dans l’échantillon de sol», commente Jonathan Zwaan. Les centaines de milliers d’espèces recensées dans des milliers d’échantillons de sol constituent une énorme quantité de données, qui sont corrélées à la présence ou non d’hydrocarbures. «Les progrès en matière de puissance de traitement de l’information permettent maintenant de construire des modèles informatiques fiables et prédictifs en tirant parti de l’apprentissage machine», note Jonathan Zwaan.
Une technique extrêmement précise
Les chercheurs ont testé une série d’algorithmes d’IA sur le contenu actuel de la base de données de Biodentify afin d’obtenir la plus grande précision possible dans la corrélation entre les microbes identifiés et la présence de pétrole ou de gaz. Ils ont également mis en place quatre pilotes de validation de concept pour démontrer l’efficacité de la technologie à des clients du secteur pétrolier et gazier. Le premier pilote, lancé en Argentine, a prédit la présence d’hydrocarbures dans un milieu conventionnel avec une précision de 97 % et a pu faire distinction entre les dépôts de pétrole peu profond et ceux de gaz profond. Le pilote réalisé en mer du Nord a utilisé des déblais de forage pour prédire la présence de pétrole ou de gaz avec une précision de 82 %. Et aux États-Unis, deux pilotes ont été menés, l’un pour le gaz de schiste au Texas et l’autre pour le pétrole de schiste dans le Dakota du Nord, ce qui a permis d’obtenir une prévision correcte à 85 %. Ainsi, la biodentification permettra de rendre moins onéreuse la production et l’exploration conventionnelle en mer comme sur terre des produits extraits du schiste et de réduire les impacts environnementaux, tout en complétant les études sismiques classiques destinées à quantifier la quantité d’hydrocarbures présents dans le sol. «Notre technologie contribuera grandement à réduire les risques liés au forage de puits de pétrole et de gaz, tant pour la production de gaz et de pétrole de schiste que pour l’exploration conventionnelle en mer et sur terre, grâce à nos prévisions solides et précises», conclut Jonathan Zwaan.
Mots‑clés
Biodentify, pétrole, gaz, forage, schiste, ADN, exploration pétrolière et gazière, en mer, bactérie, apprentissage machine, IA