Une approche «shotgun» du métagénome du poisson révèle les liens entre les bactéries intestinales et la santé
Industrie émergente il y a peu, l’aquaculture est devenue le secteur alimentaire qui connaît la croissance la plus rapide au monde et qui produit aujourd’hui plus d’aliments destinés à la consommation humaine que la pêche sauvage. La clé pour assurer le développement continu d’une aquaculture durable consiste à accroître l’efficacité de l’alimentation. Le ratio de conversion alimentaire est un indicateur majeur de l’efficacité alimentaire et décrit la quantité d’aliments utilisés pour élever un kilogramme de poisson. Connaître la quantité d’aliments nécessaires permet à l’éleveur de déterminer la rentabilité. Outre le fait qu’il offre une mesure de l’efficacité de la production aquacole, le taux de conversion alimentaire indique également la capacité du poisson à convertir l’alimentation animale en rendement escompté. Les ratios non performants représentent une charge pour l’environnement.
La santé des poissons aux mains des bactéries
Depuis peu, dans les régimes aquacoles, les protéines animales sont de plus en plus remplacées par des ingrédients d’origine végétale. L’effet de cette stratégie sur les processus métaboliques connexes qui régulent la santé et la croissance des poissons demeure inconnu. Identifier les bactéries bénéfiques permettrait d’optimiser l’efficacité de l’alimentation et de renforcer l’immunité des poissons d’élevage. Des solutions prometteuses pour optimiser l’efficacité de l’alimentation et la santé des poissons découlent d’études récentes sur le séquençage du métagénome, en se concentrant sur la manière dont le microbiome intestinal interagit avec les voies métaboliques et immunologiques chez l’homme et la souris. Financé par le programme Marie Skłodowska-Curie, le projet HappyFish a étudié les différentes fonctions des bactéries intestinales et leur rôle sur la santé globale des poissons d’élevage. Il a par ailleurs examiné comment différentes formules alimentaires interagissent avec le microbiome intestinal de la truite arc-en-ciel – une espèce de poisson commercialement importante pour l’aquaculture mondiale – et comment optimiser ces formules à l’avenir.
Une méthode moderne de métagénomique
La recherche de pointe en aquaculture a largement utilisé un simple marqueur de gène qui permet uniquement de comparer les groupes de bactéries trouvés dans les microbiomes de l’intestin des poissons. HappyFish a considérablement fait progresser la recherche sur les microbiomes dans ce domaine, faisant œuvre de pionnier en utilisant ce que l’on appelle le séquençage shotgun du métagénome de la truite arc-en-ciel. Cette méthode a permis aux chercheurs de déchiffrer les propriétés fonctionnelles codées par les gènes des micro-organismes qui constituent le microbiome intestinal de la truite arc-en-ciel. «Nous avons d’abord découpé l’ensemble du métagénome en morceaux suffisamment petits pour permettre le séquençage», explique Morten Limborg, coordinateur de HappyFish. «Le défi consistait ensuite à trier les séquences partielles et à les assembler en métagénomes spécifiques en plaçant ces fragments qui se chevauchent de la même manière que vous assembleriez un puzzle.» Les chercheurs ont relevé ce défi en recourant à des outils bioinformatiques avancés. «Nous avons caractérisé pour la première fois les rôles fonctionnels des micro-organismes symbiotiques qui apportent des fonctions cruciales à leur hôte, la truite arc-en-ciel. À titre d’exemple, citons la capacité de certains micro-organismes à améliorer la conversion alimentaire en biomasse (taux de conversion alimentaire), réduisant ainsi les déchets», ajoute Morten Limborg. L’équipe, dont fait partie Jacob Rasmussen, étudiant en doctorat, a également observé des modèles intéressants de bactéries spécifiques qui étaient nettement plus abondantes chez les poissons à croissance rapide.
Envisager l’avenir avec confiance
HappyFish innove dans la voie d’une production alimentaire plus durable dans le secteur de l’aquaculture. Morten Limborg déclare: «Les résultats devraient faciliter le développement de protocoles d’alimentation plus performants qui peuvent “travailler de concert” avec les bactéries intestinales bénéfiques pour stimuler la croissance et la santé des poissons d’élevage.» Une alimentation appropriée capable de modifier les composants naturels du microbiome intestinal pourrait réduire les coûts d’alimentation, minimiser l’impact négatif sur l’environnement et supprimer l’utilisation d’antibiotiques.
Mots‑clés
HappyFish, aquaculture, truite arc-en-ciel, métagénome, microbiome intestinal, efficacité alimentaire, taux de conversion alimentaire, séquençage shotgun
