Les éruptions volcaniques du passé pour déterminer l’avenir climatique
Déterminer le moment, le taux et le phasage précis de la variabilité climatique aide les scientifiques à développer des modèles précis, afin de simuler le futur comportement des océans et de l’atmosphère, qui sont influencés par les activités humaines. Ces études permettraient également d’établir des liens entre les preuves de la libération de CO2 depuis les eaux profondes de l’océan Austral et les données de carottage de glace quant aux variations passées du CO2 atmosphérique. Cette démarche pourrait servir à comprendre la future réponse du système terrestre face à l’augmentation des niveaux de CO2. Le projet SHARP, financé par l’UE, a examiné les relations temporelles entre les changements climatiques océaniques et atmosphériques à grande échelle survenus il y a 10 000 à 40 000 ans (10–40 ka BP), dont témoignent les carottes marines de l’océan Austral et les carottes glaciaires de l’Antarctique. Ce travail a été entrepris avec le soutien du programme Marie Skłodowska-Curie. Les chercheurs ont extrait et identifié en laboratoire des cendres volcaniques issues des éruptions survenues durant cette période, en particulier des éclats de verre formés durant une éruption volcanique et préservés dans les sédiments. «Ces éclats de verre sont présents à des concentrations tellement faibles que les couches de cendres ne peuvent pas être vues lorsque les carottes sont inspectées visuellement, ce que l’on appelle les cryptotéphras», explique Peter Abbott, chargé de recherche.
Des éruptions volcaniques localisées
Les éclats de verre ont donc été analysés géochimiquement, afin de déterminer de quel volcan ils proviennent. «Ces analyses peuvent également être utilisées comme une empreinte digitale pour relier les horizons entre les dépôts et ce cadre, ensuite elles peuvent servir de guide pour localiser es mêmes évènements volcaniques dans les relevés des carottes de glace antarctiques», poursuit M. Abbott. Les résultats ont indiqué qu’il est fort probable que d’autres processus, qui ont retardé le dépôt des éclats de verre suite aux éruptions volcaniques, aient créé les dépôts. Selon M. Abbott: «Les processus secondaires qui pourraient avoir déposé les éclats de verre sur les sites comprennent le déplacement d’icebergs ou de glace de mer et le changement des courants de fond dû à la migration des courants ou aux variations de leur vitesse». La conclusion globale, selon laquelle des processus secondaires ont contrôlé le transport d’éclats de verre volcaniques vers l’océan Austral il y a 10-40 ka BP, pourrait contribuer à déterminer les changements passés survenus dans les conditions paléocéanographiques de l’océan Austral. «La séquence des évènements suggère que les périodes de dépôt et de non-dépôt ont eu lieu au même moment sur les deux sites, indiquant des processus régionaux plutôt que locaux», commente M. Abbott.
Les processus inhérents au dépôt
Les travaux se poursuivent afin de déterminer les processus qui ont transporté et ensuite déposé les éclats de verre sur les sites, ainsi que les facteurs inhérents aux variations temporelles. «Limiter ces processus pourrait apporter des connaissances sur la manière dont l’océan a opéré durant cette période, ainsi que des informations sur les changements paléocéanographiques qui ne peuvent pas être déterminés par d’autres contraintes», observe M. Abbott. En outre, les relevés de variabilité à long terme dans le dépôt de matière volcanique (téphra) dans l’océan Austral ont également été déterminés avec une meilleure résolution que lors des études précédentes. Ils ont offert un meilleur aperçu des processus secondaires qui ont créé les dépôts de téphra et permis aux scientifiques d’établir si tous les évènements découlaient du même processus. Bien que SHARP ne puisse pas directement contribuer à comprendre le moment où ces changements climatiques passés sont survenus, il a aidé les scientifiques à déterminer d’autres techniques à employer pour examiner la relation temporelle entre les changements climatiques océaniques et atmosphériques observés dans la région. M. Abbott conclut: «SHARP démontre également les complexités des études téphrochronologiques dans un cadre marin en mettant en avant la diversité des processus affectant ces relevés, qui devraient être considérés lors de l’étude de séquences marines.»
Mots‑clés
SHARP, volcanique, océan Austral, éclats de verre, Antarctique, carotte de glace, changement climatique, cryptotéphra, volcan