Une nouvelle conception de réacteur rapide à sels fondus pour une énergie nucléaire plus sûre
Selon un rapport récent de l’ONU, la population mondiale devrait atteindre près de 11 milliards d’individus d’ici la fin du siècle, ce qui entraînera une augmentation de la demande mondiale en énergie. En raison de l’effet de serre et du changement climatique, il est urgent de trouver des solutions énergétiques de grande ampleur et à faible empreinte carbone. L’énergie nucléaire entre dans cette catégorie. En effet, l’UE est le plus grand producteur d’électricité nucléaire au monde, ce type d’énergie représentant une composante fondamentale de la Feuille de route européenne pour l’énergie à l’horizon 2050. Pourtant, les esprits ayant été marqués par les accidents de Tchernobyl et de Fukushima-Daiichi, il convient de répondre aux préoccupations relatives à la sûreté et à la durabilité avant de pouvoir en généraliser l’adoption. Le projet SAMOFAR, soutenu par l’UE dans le cadre du programme de recherche Euratom, a fait progresser la conception des réacteurs rapides à sels fondus (MSFR) afin de proposer une véritable révolution dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la gestion des déchets y afférents. Parmi ses réalisations, le projet a permis d’améliorer la conception globale des réacteurs, de mettre au point des méthodes d’évaluation intégrale de la sûreté, de concevoir des valves de sûreté de congélation et de générer de meilleures données sur le comportement des sels utilisés dans le système.
Une solution sûre et durable avec une gestion optimale des déchets
La nouvelle génération de réacteurs nucléaires doit être conçue en intégrant dès le départ les normes de sécurité les plus strictes. Comme le souligne la feuille de route de la plateforme pour l’énergie nucléaire durable, il est particulièrement important de poursuivre le développement des surgénérateurs et des cycles des combustibles associés en raison de leur meilleur rendement par rapport aux réacteurs «burner». «Un surgénérateur produit plus de matières fissiles qu’il n’en consomme, tandis qu’un réacteur “burner” détruit plus de matières fissiles (principalement du plutonium) qu’il n’en produit», explique Jan Leen Kloosterman, coordinateur du projet. Le MSFR de SAMOFAR peut fonctionner soit comme un surgénérateur dans le cycle du combustible au thorium, avec recyclage in situ des éléments radioactifs (actinides), soit comme un réacteur «burner» alimenté au plutonium et aux actinides mineurs, incinérant les déchets nucléaires à vie longue. Dans le réacteur conçu par SAMOFAR, le sel liquide transporte le combustible et la chaleur. Comme le sel liquide est à la pression ambiante, lorsqu’il est chauffé, il peut se dilater librement, ce qui offre une forte rétroaction négative sur la réactivité. Cela signifie que si le réacteur devient trop chaud, la réaction de fission ralentit automatiquement et la température se stabilise à un niveau acceptable, car la chaleur de décroissance passive est évacuée vers l’environnement. En cas d’accident, pour éliminer la chaleur de désintégration, le mélange de sels de combustible sera automatiquement évacué par le biais de «bouchons de congélation», vers des réservoirs à sûreté intégrée. Le mélange de sels de combustible est nettoyé en permanence dans une usine chimique intégrée. L’équipe a effectué un certain nombre d’essais pour étudier le comportement dynamique des boucles de fluides chauffés de façon interne (tels que les sels fondus dans un réacteur) et les propriétés du sel fluide lui-même, en examinant le rejet des produits de fission, les propriétés thermo-physiques, les phénomènes de gel/fusion et la performance des bouchons de sécurité en sel congelé. Par ailleurs, un simulateur logiciel a été développé pour procéder à la démonstration de la réponse du réacteur SAMOFAR aux phénomènes transitoires de fonctionnement (comme le démarrage, l’arrêt, le suivi de charge, etc.). «Conjointement avec les essais, cela nous a donné des indications très utiles sur le comportement dynamique et les capacités du réacteur, qui se sont tous avérés excellents», indique Jan Leen Kloosterman.
Pour une industrie nucléaire européenne forte
«Le projet a permis de mettre au point de nombreux systèmes de codage, instruments et innovations de pointe, et a donc déjà contribué à placer l’UE à l’avant-garde de la science sur laquelle reposent les MSR», conclut Jan Leen Kloosterman. Pour faire avancer les travaux, l’équipe poursuit maintenant la modélisation des MSR et procède à la validation expérimentale de ces codes afin de renforcer la prévention des accidents.
Mots‑clés
SAMOFAR, nucléaire, puissance, énergie, réacteur, combustible, fission, Tchernobyl, Fukushima-Daiichi, thorium, plutonium