Une meilleure compréhension des réponses au stress dans le blanchissement du corail
Les récifs coralliens reposent sur la symbiose entre des microalgues et un animal calcifiant pour construire leur infrastructure. Cependant, le changement climatique menace aujourd’hui les récifs coralliens du monde entier en provoquant un dysfonctionnement symbiotique connu sous le nom de «blanchissement du corail». Si les scientifiques savent que le blanchissement est une réponse spécifique aux espèces et à des facteurs de stress, les réponses cellulaires et intercellulaires sous-jacentes restent peu étudiées. Il est établi que l’oxyde nitrique (NO) et le peroxyde d’hydrogène (H2O2) interviennent, mais leurs sources, leur interaction et leur dynamique n’avaient pas été étudiées dans les coraux avant le projet DENOCS soutenu par l’UE. DENOCS a permis pour la première fois de visualiser la production de NO spécifique à un facteur de stress dans une symbiose intacte en utilisant des cultures de tissus coralliens. Les expériences ont montré que les facteurs de stress «typiques» du blanchissement du corail favorisaient la production de NO sur le site des microalgues. L’équipe a également montré qu’un stress léger à lui seul pouvait induire le même effet.
Quand la symbiose se brise
En cas de stress environnemental, la symbiose se brise entre l’animal hôte (des cnidaires de l’ordre des Scléractiniaires) et les microalgues de la famille des Symbiodiniacées vivant dans leurs tissus. Lorsque les microalgues dépérissent ou sont expulsées, tout ce qui est alors visible est le squelette de corail blanc d’apparence décolorée en-dessous de l’animal presque transparent. Si les conditions de stress ne s’atténuent pas, le corail meurt. Les températures élevées de la surface de la mer, associées à une forte luminosité, sont les principaux facteurs de stress conduisant au blanchissement du corail. Cependant, différentes espèces de microalgues peuvent réagir différemment au stress, et certains coraux peuvent moduler leur résilience en échangeant leur symbiote microalgal avec une espèce plus tolérante au stress. DENOCS a utilisé la bio-imagerie et la détection micro-environnementale dans les coraux soumis à un stress pour déterminer si l’animal corallien ou les microalgues sont les principaux producteurs de radicaux cellulaires (H2O2 ou NO) dans la réponse au blanchissement. En utilisant des cultures de tissus coralliens (provenant du corail Fungia fungites) soumis à un stress thermique et à une forte luminosité sous incubation à court terme (6 heures) et à long terme (24 heures), il a été possible de détecter la présence et la localisation du NO dans l’arrangement tissulaire symbiotique sur un microscope confocal après addition d’un colorant fluorescent sensible au NO. L’équipe a également découvert qu’un faible taux d’oxygène pouvait stimuler la production de radicaux cellulaires nocifs comme le NO. Il a également été observé que différentes cultures de microalgues (Symbiodinium microadriaticum et S. tridactnidorum) répondaient différemment au facteur de stress NO. «Lorsqu’un corail est l’hôte de S. microadriaticum et que l’animal libère du NO en réponse à un stress causé par une température élevée ou la lumière, la productivité de son symbiote microalgal diminue. Cela signifie qu’une moindre quantité d’énergie sera transférée à l’hôte comparativement à un corail abritant un symbiote microalgal moins sensible au NO», explique Verena Schrameyer, boursière de recherche postdoctorante dans le cadre du projet DENOCS.
Gestion des récifs coralliens
Les chercheurs et les médias soulignent régulièrement que le blanchissement du corail est l’une des conséquences les plus dévastatrices du changement climatique. Le projet DENOCS permet d’expliquer plus en détail ce qui se passe et comment certains de ces mécanismes de stress sont semblables à ceux qui agissent chez les animaux supérieurs. «En permettant de mieux comprendre les réponses au stress nitrosatif et oxydatif chez les coraux, le projet DENOCS aide à quantifier les concentrations seuils et les sites d’impact probables pour des interventions plus efficaces», explique Michael Kühl, coordinateur du projet. Les progrès technologiques de DENOCS pourraient servir à d’autres travaux écotoxicologiques. Les techniques expérimentales pourraient, par exemple, être utilisées pour étudier comment les polluants environnementaux comme les lixiviats de plastique ou d’autres xénobiotiques affectent la production de radicaux cellulaires et leurs seuils critiques pour le stress corallien.
Mots‑clés
DENOCS, corail, changement climatique, facteur de stress, blanchissement, biodiversité, écosystème, oxyde d’azote, peroxide d’hydrogène, Scléractiniaires, symbiose, Symbiodiniacées, microalgues, bio-imagerie, capteurs