Vers un dialogue ouvert sur les bénéfices et les risques associés aux nanotechnologies
Les participants à un projet européen ont élaboré une série d'outils pour contribuer à encourager un dialogue entre les scientifiques, les décideurs politiques et le public sur les bénéfices et les impacts potentiels des nanosciences et des nanotechnologies. Comme l'indique le rejet permanent des OGM (organismes génétiquement modifiés) par le public, une fois que la confiance de celui-ci à l'égard d'une nouvelle technologie est perdue, il est extrêmement difficile de la regagner. Bien que les nanotechnologies offrent la promesse de nouvelles avancées enthousiasmantes dans tout un éventail de domaines, de l'énergie à l'environnement en passant par les textiles et la médecine, la sécurité de ces nouvelles technologies suscite également des interrogations. L'objectif de Nanologue, un projet financé au titre du sixième programme-cadre (6e PC), consiste à promouvoir un dialogue ouvert et franc entre les scientifiques, les décideurs politiques et le public portant à la fois sur les bénéfices et les dangers potentiels des nanotechnologies. Le projet touche désormais à sa fin. Coordinateur du projet, Volker Türk, de l'institut de Wuppertal (Allemagne), a indiqué à CORDIS Nouvelles les principales recommandations émises au titre du projet. Ainsi, selon lui, le principal problème est qu'on a trop souvent tendance à mettre dans le même sac toutes les nanotechnologies, ce qui fait qu'en cas de problème dans un domaine particulier, tous les autres sont affectés. «Nous devrions clairement faire savoir qu'il existe différentes technologies dont les risques et les bénéfices sont également différents», déclare-t-il. Les participants au projet recommandent aussi que les résultats de celui-ci soient accessibles librement, éventuellement par le biais d'un centre d'information unique chargé de réunir les travaux de recherche relatifs à diverses technologies. Enfin, le débat se doit d'être ouvert et franc. «Nous ne devons pas prétendre que les risques sont inexistants, mais nous devons également reconnaître que les opportunités sont considérables», commente M. Türk. Lors de leur étude, les partenaires du projet se sont rendus compte que la plupart des individus qui travaillent sur les nanotechnologies n'ont pas pleinement conscience des implications éthiques de leurs travaux. «Nous avons constaté que la question de l'éthique fait l'objet de nombreux débats, mais que ceux-ci restent très théoriques. En outre, ceux qui développent ces technologies ignorent ce point», explique M. Türk. Cela a incité les partenaires du projet à élaborer le Nanomètre, un outil en ligne conçu pour aider les chercheurs et les développeurs de produits à identifier les domaines susceptibles de susciter des préoccupations d'ordre éthique, environnemental ou sociétal parmi les futurs consommateurs. «Nous sommes partis des éléments fondamentaux de ce que nous avions appris pour les synthétiser en 18 questions afin de donner une idée des points sur lesquels le public pourrait s'interroger», explique M. Türk. Ces questions sont divisées en sept rubriques et couvrent des thèmes tels que les bénéfices sociaux, la santé et l'environnement, les besoins en ressources, le respect de la vie privée et la transparence. Chaque rubrique commence par une brève introduction décrivant la pertinence de cette question dans le contexte des nanotechnologies. Les questions sont élucidées par une courte explication, tandis qu'une série de liens permet aux utilisateurs d'étudier les différents points de manière plus approfondie s'ils le souhaitent. A la fin de l'étude, un tableau résume les réponses de l'utilisateur et met en relief les points susceptibles d'être préoccupants. Les utilisateurs qui s'inscrivent sur le site peuvent également sauvegarder les données pour y revenir ultérieurement. Les partenaires du projet vont désormais s'atteler à promouvoir l'outil auprès de la communauté active dans le domaine des nanotechnologies. L'autre résultat important du projet est l'élaboration d'une série de scénarios permettant d'étudier l'évolution possible des nanotechnologies d'ici à 2015. Ces scénarios, mis au point par des experts, résultent de variations au niveau des facteurs clés susceptibles d'influencer le développement et l'utilisation futurs de ces technologies. Parmi ces facteurs, citons le cadre juridique et politique, le prix des matières premières, l'allure du progrès scientifique dans les nanotechnologies et les pressions environnementales. Quel que soit le scénario examiné, les nanotechnologies finissent par être utilisées de manières très différentes, et leur degré d'acceptation parmi le public varie. Désormais, les chercheurs comptent organiser des ateliers avec les décideurs pour leur montrer les scénarios et les aider à comprendre l'impact que leurs politiques pourraient avoir. Une pièce de théâtre s'appuyant sur les scénarios a également été écrite, dont la première représentation publique sera donnée à l'occasion d'un salon à Munich. Quant à l'avenir, M. Türk compte étudier de plus près l'utilisation des nanotechnologies dans le domaine énergétique. «Nous avons identifié le domaine énergétique comme offrant de nombreuses opportunités, mais nous avons besoin d'une évaluation plus détaillée des avantages et des inconvénients potentiels», explique-t-il. En attendant, le Parlement européen s'est prononcé en faveur d'un rapport appelant à une hausse du financement accordé à la recherche dans le domaine des nanotechnologies ainsi qu'à une clarification de l'environnement juridique et commercial sur lequel s'appuient ces technologies. Les auteurs de ce rapport notent également qu'une «approche éthique» est essentielle pour gagner la confiance du public.
Pays
Suisse, Allemagne, Royaume-Uni