La production de modèles 3D «en situation réelle» d'une infrastructure existante
Un des principaux problèmes rencontrés par les ingénieurs est l'incapacité à cartographier et étiqueter efficacement les infrastructures existantes. Actuellement, plus des deux tiers des efforts sont consacrés à la conversion manuelle des nuages de points (coordonnées) en modèle 3D. En conséquence, rares sont les bâtiments pour lesquels on dispose d'un registre complet d'informations de construction réelles, qui ne sont pas générées pour la grande majorité des projets de constructions neuves et de rénovations. On estime que ce manque induit des coûts de modification de conception et de transformation pouvant s'élever à 10 % du montant initial des travaux. Le projet INFRASTRUCTUREMODELS, financé par l'UE, a été mis en place pour pallier ce manque en mettant au point un système capable de détecter et classer les objets de construction courants à partir de données visuelles et spatiales, dans le but de réduire le temps nécessaire à la création du Modèle d'informations de construction géométrique de la construction réelle. Le projet est parvenu à créer des méthodes qui génèrent des objets / assemblages de dalles, murs, pièces et sols dans des ensembles de données de nuage de points, afin de produire rapidement des modèles 3D de bâtiments existants et de réduire ainsi les dépenses. Exploiter les «préalables architecturaux» Les modèles de construction en situation réelle sont des modèles virtuels 3D orientés objet des structures existantes. Ils se différencient des modèles de conception par le fait que leurs dimensions reflètent les mesures réelles des éléments bâtis. Jusqu'à présent, les tentatives visant à resituer les modèles d'infrastructure 3D «en situation réelle» s'appuyaient sur une approche ascendante consistant à commencer par localiser les points importants puis à rechercher les lignes et plans principaux, avant de passer aux objets. Cette méthode manque toutefois d'efficacité pour de nombreux éléments d'infrastructure. Comme l'explique le Dr Ioannis Brilakis, coordinateur du projet, «Un grand nombre d'objets de l'infrastructure sont 'banals'. Colonnes, poutres, dalles et murs présentent par exemple très peu de points importants permettant de les distinguer les uns des autres.» Pour contourner cette difficulté, le projet INFRASTRUCTUREMODELS a axé ses recherches sur les informations contextuelles qui peuvent rendre ces objets discernables, comme leur position dans l'espace, ainsi que leur relation avec les autres objets. Ils y sont parvenus en créant un ensemble d'étapes segmentées qui décomposent le nuage de points d'un bâtiment en planchers, pièces, murs/dalles, etc. Comme le résume le Dr Brilakis, «les bâtiments sont complexes mais ils sont tous constitués de planchers, murs, portes et autres éléments clés qui entretiennent les uns avec les autres des relations normalisées relativement bien définies. Ces préalables architecturaux sont ce que nous essayons d'exploiter pour faciliter le processus de détection.» L'équipe a eu recours à des outils d'analyse d'image pour caractériser visuellement l'infrastructure, identifiant et cartographiant ainsi les éléments de manière numérique. Ces relations, ainsi que leurs relations topologiques présumées, sont les «éléments» utilisés par les algorithmes d'apprentissage automatique pour créer des catégories d'infrastructures significatives pour les modèles. Ces derniers peuvent alors détecter automatiquement les types d'éléments ainsi que leurs positions relatives sous des angles différents. En estimant leur distance par rapport à l'observateur ainsi que leur position 3D dans l'espace par rapport aux autres points, ces éléments peuvent être cartographiés sur les nuages de points 3D et restitués en couleur et avec une texture, pour produire des modèles précis. Comme le précise le Dr Brilakis, «les images sont très utiles pour déterminer à quelle catégorie appartient chaque objet. Par exemple, une couleur blanche sur un cuboïde mince et long orienté verticalement augmente la probabilité qu'il s'agisse d'un mur. Un motif de tapis sur le même objet nous amènerait à faire une déduction différente.» La principale difficulté rencontrée par l'équipe a été de rassembler suffisamment de données pour tester les algorithmes, l'infrastructure figurant souvent très loin dans les priorités des secteurs du big data. Les nuages de points ne faisant pas exception, l'équipe n'a trouvé que très peu de partenaires industriels capables de mettre ce type de données à sa disposition. De plus, parmi les données disponibles, la plupart ne répondaient pas aux normes de qualité requises. L'équipe du projet est confiante dans le fait que ses modèles 3D seront utiles dans le cadre d'opérations telles que la rénovation des infrastructures énergétiques dans le but de résoudre des problèmes, augmenter le rendement ou mieux respecter l'environnement. Le secteur de la gestion technique des bâtiments présente lui aussi diverses applications possibles. De plus, dans le cas des usines, le fait de disposer de modèles de construction basés sur des informations réelles permettrait de réduire l'impact d'une éventuelle interruption d'activité. L'équipe est en train de créer un centre de commercialisation à Cambridge, au Royaume-Uni, afin de soutenir le développement rapide de cette technologie et des autres avancées associées. Son objectif est de commercialiser des produits d'ici deux à trois ans.
Mots‑clés
INFRASTRUCTUREMODELS, infrastructure, modèles en situation réelle, 3D, rénovation, ingénierie, nuage de points, architecture, analyse d'image, algorithmes, gestion des opérations