Le succès des «réseaux intelligents» repose sur un comportement émergent des systèmes collectifs
Les villes intelligentes dépendent d'une plus grande connectivité numérique, grâce à des technologies comme l'Internet des objets, avec ses réseaux de capteurs sans fil. Contrairement aux solutions informatiques centralisées de grande taille, ces systèmes sont constitués de petits éléments informatiques répartis. Ces éléments individuels font cependant preuve d'un comportement adaptatif, qui est non seulement façonné par le système mais façonne également ce dernier. Si ce mécanisme permet une activité concertée, il n'en pose pas moins de considérables problèmes de conception et de fonctionnement. Par exemple, tout en collaborant pour atteindre des objectifs communs, certains éléments risquent d'entrer en concurrence pour utiliser des ressources partagées. Pour surmonter ces problèmes, le projet QUANTICOL, financé par l'UE, a utilisé un modèle descriptif appelé «système adaptatif collectif» (CAS) pour permettre une modélisation du système dans le temps et l'espace. Le cadre CAS a permis de modéliser à la fois le comportement des composants individuels et le comportement émergent découlant des interactions au sein du système. Ces modèles ont prédit les effets possibles des interactions avec les utilisateurs, en mettant l'accent sur des critères comme la rapidité et la pertinence de la réponse du système. Exploiter les systèmes adaptatifs pour améliorer le confort des utilisateurs QUANTICOL s'est particulièrement intéressé aux problèmes de gestion des ressources dans le cadre du transport urbain intelligent et des systèmes de distribution intelligents. Pour expliquer le fonctionnement pratique de cette approche, le professeur Jane Hillston, coordinatrice du projet, déclare: «Prenez par exemple les systèmes de vélos en libre-service; nous savons qu'il n'est pas bon qu'une station soit totalement pleine ou totalement vide. En utilisant la modélisation pour suivre les composants du système et leurs interactions, nous pouvons aider les systèmes informatiques sous-jacents à anticiper la demande et améliorer la réponse du système, par exemple en planifiant les capacités.» La modélisation dépendait de la mise au point préalable d'un langage de spécification capable de décrire le système avec précision. À ce sujet, le professeur Hillston se souvient que «le langage que nous utilisions appartenait à une famille de langages formels appelés algèbres des processus stochastiques. Nous avons ensuite établi des règles pour construire des représentations mathématiques à partir des descriptions du système, connues pour être adaptées à diverses techniques d'analyse.» L'équipe s'est particulièrement intéressée aux structures mathématiques facilitant une analyse par «approximation continue», car cette technique produit des résultats précis pour des systèmes de très grande taille, avec des besoins réduits en puissance de calcul. Une fois définies les exigences de modélisation, l'équipe a utilisé des techniques d'analyse automatique pour tester des hypothèses à l'aide de scénarios. Le grand nombre de composants impliqués et leur dispersion spatiale rendent difficile l'analyse par informatique. Comme le fait remarquer le professeur Hilston, «la contribution majeure de QUANTICOL a été de développer des techniques d'analyse permettant de prévoir le comportement de systèmes de grande taille dans un délai raisonnable, quelque fois même en temps réel. Il s'agit d'une amélioration considérable par rapport à l'état de la technologie au début du projet, qui offre la perspective d'une surveillance et d'une planification en temps réel.» QUANTICOL est également parvenu à élargir la classe des modèles pour lesquels il est possible d'appliquer une approximation continue, tout en améliorant la précision des données d'approximation. Faire passer les compétences linguistiques au niveau supérieur Beaucoup d'espoirs ont été placés dans les systèmes informatiques intelligents pour fournir des produits et services capables de relever des défis mondiaux tels que le changement climatique, tout en assurant également un mode de vie plus durable et efficace. Mais, selon le professeur Hillston, «en s'intégrant à notre environnement physique, les systèmes informatiques deviennent toujours plus envahissants. Mais d'une certaine façon, ils deviennent également plus transparents, car les utilisateurs en dépendent. Il est essentiel que ceux qui développent et déploient ces systèmes aient à leur disposition des outils pour évaluer leur comportement avant, pendant et après leur mise en service.» Pour faire avancer les travaux, l'équipe de QUANTICOL continue à chercher de nouvelles façons de combiner des langages et logiques formels avec des modèles mathématiques sophistiqués, afin que les concepteurs et opérateurs de système, qui ne sont pas nécessairement formés sur ces domaines, puissent néanmoins tirer profit des résultats. L'équipe élargit également la modélisation aux systèmes et applications qui pourraient bénéficier d'approches par approximation fluide. Tout en appliquant ses techniques CAS à des systèmes plus familiers comme les protocoles de propagation des données dans les réseaux pair-à-pair et les modèles épidémiologiques, l'équipe explore de nouvelles classes de systèmes. Elle a par exemple exploré le comportement et les interactions entre les cultivateurs pratiquant une agriculture de subsistance en Afrique subsaharienne, afin de mieux comprendre leurs effets sur la sécurité alimentaire. QUANTICOL a été officiellement financé par le programme Technologies futures et émergentes (FET) de la Commission européenne.
Mots‑clés
QUANTICOL, systèmes adaptatifs collectifs, CAS, méthodes formelles, villes intelligentes, réseaux intelligents, Internet des objets, approximation fluide, logique, langage de spécification, algèbres des processus stochastiques, réseaux de transport, modél