Le méthane à l'origine de l'augmentation soudaine de l'oxygène sur Terre il y a des milliards d'années?
Soutenues en partie par le projet OXYGEN de l'Université de St Andrews, au Royaume-Uni, qui bénéficie d'un financement de l'UE, les recherches suggèrent qu'il y a plusieurs milliards d'années, l'atmosphère terrestre a été envahie d'une brume à forte teneur en méthane pendant environ un million d'années. Cette brume a chassé une grande quantité d'hydrogène de l'atmosphère, laissant ainsi la place à d'importants volumes d'oxygène qui ont ainsi rempli l'air et créé une atmosphère très proche de celle que nous connaissons. Avant cette transformation due au méthane, l'atmosphère terrestre renfermait des gaz toxiques qui entraînaient des variations de température extrêmes en surface, la rendant inhospitalière. La recherche publiée dans la revue 'Proceedings of the National Academy of Sciences' a pu compter sur une collaboration avec l'Université du Maryland, le Jet Propulsion Laboratory de la NASA, l'Université de Leeds et le Blue Marble Space Institute of Science. Dans son étude, l'équipe de recherche émet l'idée qu'un nouveau facteur a pu contribuer à la Grande Oxydation survenue il y a quelque 2,4 milliards d'années, durant laquelle les concentrations en oxygène dans l'atmosphère terrestre ont été multipliées par plus de 10 000. «La transformation de l'air terrestre d'un mélange toxique en une atmosphère riche en oxygène plus favorable s'est produite en un instant géologique», a expliqué James Farquhar, professeur de géologie à l'Université du Maryland et co-auteur de l'étude. «Grâce à cette étude, nous disposons enfin de la première vision complète de la façon dont la brume de méthane a pu produire cet effet.» Plus précisément, les chercheurs ont utilisé des relevés chimiques détaillés et des modèles atmosphériques sophistiqués pour reconstituer la composition chimique de l'atmosphère au cours de la période qui a immédiatement précédé la Grande Oxydation. Les résultats obtenus suggèrent que d'anciennes bactéries (alors la seule forme de vie sur Terre) ont produit des quantités massives de méthane dont la réaction a eu pour effet de remplir l'air d'une épaisse brume. Cette étude est la première à mettre en évidence la rapidité avec laquelle ces événements se sont déclenchés ainsi que leur durée. À titre de comparaison, cette atmosphère reflète les conditions atmosphériques actuelles de Titan, la plus grande lune de Saturne. L'étude est devenue d'autant plus passionnante que l'on a découvert des schémas d'isotopes de soufre anormaux dans les relevés géochimiques de l'époque étudiée. Les isotopes de soufre sont souvent utilisés pour reconstituer des conditions atmosphériques de périodes éloignées, mais les précédentes études de la période considérée n'ont rien révélé d'inhabituel. «En raison des fortes concentrations de méthane, une plus grande quantité d'hydrogène, c'est-à-dire du principal gaz empêchant l'accumulation d'oxygène, a pu s'échapper dans l'espace extra-atmosphérique, et ouvrir la voie à une oxygénation globale», a déclaré Aubrey Zerkle, biogéochimiste à l'Université de St Andrews et co-auteur de l'étude. «Notre nouvel ensemble de données représente le relevé de chimie atmosphérique de l'Archéen le plus précis jamais produit et dresse un portrait spectaculaire des conditions de la surface de la Terre avant son oxygénation.» Au total, la brume de méthane est restée dans l'atmosphère pendant environ un million d'années et il a fallu qu'une quantité suffisante d'hydrogène quitte l'atmosphère pour que les conditions chimiques propices s'installent et déclenchent l'augmentation soudaine d'oxygène nécessaire à l'évolution de la vie multicellulaire. «Retracer l'évolution de la composition chimique de l'atmosphère est depuis longtemps l'objectif de la recherche géochimique», a déclaré Gareth Izon, auteur principal de l'étude en qualité de chercheur post-doctorat à St Andrews. «Les nouvelles données obtenues montrent que la composition chimique de l'atmosphère était dynamique et, au moins avant la Grande Oxydation, hypersensible à la régulation biologique.» Le projet OXYGEN (Quantifying the evolution of Earth's atmosphere with novel isotope systems and modelling, qui a bénéficié d'un financement européen de près d'1,8 million d'euros se poursuivra à St Andrew jusqu'en mai 2021. Pour plus d'informations, veuillez consulter : page du projet CORDIS
Pays
Royaume-Uni