Une aquaculture du poisson-chat plus durable, plus rapide et plus productive
Face à la production stagnante de la pêche et aux soucis sanitaires et d'environnement soulevés par l'aquaculture, il n'a jamais été aussi urgent de mettre au point des systèmes d'aquaculture durables, capables de fournir localement des produits sains, frais et de haute qualité, en respectant des règles strictes pour protéger le consommateur, le poisson et l'environnement. Aranyponty Zrt., une entreprise hongroise produisant de l'eau potable et exploitant un élevage piscicole de plus de 1 500 hectares à Retimajor, espère répondre à cette demande grâce à une technique durable d'élevage des poissons-chats (Silurus glanis). Via le projet SILGEN (Sustainable farming of European catfish (Silurus glanis) for innovative, resource efficient and eco-friendly pond farm production), l'entreprise a bénéficié d'un financement de l'UE dans le cadre de l'Instrument PME, et mis au point une technique économe en ressources, respectueuse de l'environnement, plus rapide et plus productive que les autres. Ferenc Lévai, coordinateur du projet SILGEN, détaille les principales innovations du projet et les résultats de l'étude de faisabilité, à l'approche du terme du projet, le 31 mai. En quoi votre solution d'aquaculture diffère-t-elle des méthodes actuelles? Dans l'aquaculture traditionnelle en bassin, les poissons prédateurs de grande qualité (et valeur) ne sont élevés qu'en polyculture avec des cyprinidés. Le rapport est d'environ 3 à 4 % de la production totale. Ceci équivaut à 30-40 kg/ha maximum de poissons, ce qui est considéré comme «bon», même pour un élevage traditionnel. L'espèce que nous visons, le poisson-chat européen, est un prédateur de grande valeur commerciale. Jusqu'ici, il était principalement élevé dans des bassins en terre à très faible densité et nourri aux cyprinidés, ou dans des systèmes fermés, nourri de granulés artificiels. Ces deux techniques sont à la limite de l'équilibre entre pertes et profits, c'est pourquoi la production est si faible par rapport à l'élevage des carpes et des truites en Europe Centrale et de l'Est. Dans notre projet, nous associons des systèmes fermés avec la recirculation d'eau et la culture en bassins. Un système fermé est excellent pour la production de poissons d'un an, mais seule la culture en bassin peut permettre à la production de poisson-chat de consommation de concurrencer le dumping du panga en Asie. En combinant la production de poissons d'un an dans des systèmes d'aquaculture à recirculation, avec l'élevage de poissons de consommation en bassin, nous pouvons réduire le délai de production à deux ans (au lieu de trois avec l'ancienne méthode) et augmenter le rendement de 30 à 3 000 kg/ha de poisson-chat. Dans ce cas, le poisson est nourri aux granulés, mais peut aussi consommer à volonté les organismes qui se sont développés dans l'eau des bassins. Ceci complète l'apport en nutriments. La nouvelle technique se démarque également de l'ancienne par la méthode de recirculation utilisée. Nous économisons de l'eau en nettoyant l'eau polluée du bassin d'élevage intensif dans un bassin de «polyculture sans alimentation» à faible densité. Pourquoi avoir choisi le poisson-chat européen? Le poisson-chat européen est le deuxième plus gros poisson d'eau douce (après le grand esturgeon). C'est un prédateur à la chair savoureuse, à croissance rapide et sans arêtes intermusculaires. Il supporte bien les températures hivernales froides (contrairement au poisson-chat africain) et peut être élevé dans nos grands bassins à carpes. Qu'avez-vous appris jusqu'ici de l'étude de faisabilité, dans le cadre de la phase 1 de l'initiative H2020? L'étude de faisabilité effectuée via l'Instrument PME Phase 1 a été une excellente opportunité de renforcer notre stratégie commerciale. La bonne nouvelle est qu'il y a un marché pour nos produits. De plus, comme nous élevons une espèce native, la possibilité que des individus s'échappent des bassins d'élevage pour rejoindre les rivières naturelles et les lacs ne présente aucun risque. Nous avons aussi appris que le «filet frais sur glace» sera notre produit qui se vendra le mieux. Il concurrencera efficacement le panga. La fraîcheur et le transport sur de courtes distances étant les facteurs les plus importants, l'élevage d'un poisson natif représente un avantage clé. Quelles sont les principales garanties pour le consommateur? L'objectif du projet en cours mené via l'Instrument PME Phase 1 est de procéder à une étude de faisabilité. Toutefois, durant la Phase 2, nous prévoyons de mener un projet pilote de grande envergure dans notre élevage piscicole de 1 500 hectares, pour démontrer la technique en vraie grandeur et apporter des garanties au client. Vous prévoyez donc de demander un financement de Phase 2 au terme du projet en mai? Que viserez-vous aussi grâce à ce financement complémentaire? Nous prévoyons effectivement de déposer notre candidature pour la phase 2. Nous utiliserons le financement à des fins techniques et pour commercialiser le projet SILGEN. Nous prévoyons d'adapter nos bassins de carpes à la culture du poisson-chat et de mener une «sélection assistée par marqueurs» afin de sélectionner une espèce de poisson-chat encore plus résistante et à croissance accélérée. Ces derniers travaux s'effectueront en collaboration avec des généticiens de l'université de Pannonie, en Hongrie. L'amélioration de notre usine de transformation du poisson est également prévue pour soutenir le développement du projet. D'après vous, où en sera votre entreprise dans cinq ans? Dans notre propre élevage (environ 1 500 ha), nous visons une production de 2 000 tonnes de poisson-chat, et en coopération avec d'autres élevages qui représentent quelques 5 000 ha, nous aimerions produire 2 ou 3 000 tonnes de plus d'ici cinq ans. Nous aimerions devenir le principal fournisseur d'alevins pour nos élevages partenaires. SILGEN Financé au titre de H2020-SME-1 page du projet sur CORDIS
Pays
Hongrie